La dissolution de Casa Patrimoine marque un tournant pour Casablanca. Entre espoir de renouveau et crainte d’un patrimoine en péril, la ville fait face à un défi majeur : réinventer sa gestion patrimoniale. Détails.
Le couperet est tombé sur Casa Patrimoine, laissant Casablanca orpheline de son gardien architectural, apprend-on via un confrère. Mais qui pleurera vraiment cette SDL aux promesses avortées, aux millions engloutis dans les sables mouvants de l’inefficacité ? Certainement pas les façades Art déco du boulevard Mohammed V, témoins muets d’une décennie de négligence. Ni les passages historiques Botbol, El Glaoui, Sumica et Tazi, dont les voûtes centenaires n’ont connu que l’écho des promesses non tenues.
La ville blanche se réveille, les yeux rivés sur un patrimoine en lambeaux. Que faire des chantiers fantômes, des conventions signées en grande pompe et oubliées dans les tiroirs poussiéreux de l’administration ? Les élus, soudain orphelins de leur bras armé patrimonial, se retrouvent face au miroir fêlé de leurs ambitions déchues.
Mais voilà que déjà on murmure le nom de Casa Aménagement comme successeur désigné. Passera-t-on ainsi du Charybde de l’incompétence au Scylla de l’improvisation ? Les Casablancais, échaudés par une décennie de vaines promesses, observent d’un œil sceptique ce jeu de chaises musicales institutionnel.
L’heure n’est plus aux lamentations mais à l’action. Le patrimoine casablancais, ce livre d’Histoire à ciel ouvert, n’attend pas. Chaque jour qui passe voit s’effriter un peu plus le rêve architectural des bâtisseurs d’antan. Qu’adviendra-t-il des projets en cours, suspendus comme autant d’épées de Damoclès au-dessus d’une ville en quête d’identité ?
La confiance, denrée rare s’il en est, ne se décrète pas. Elle se construit, pierre après pierre, projet après projet. Les nouveaux maîtres d’œuvre du patrimoine casablancais devront faire preuve d’une transparence cristalline, d’une efficacité sans faille. Plus question de se cacher derrière le voile opaque des SDL pour justifier retards et dérapages budgétaires.
L’argent public, ce nerf de la guerre patrimoniale, devra être manié avec la précision d’un chirurgien et la parcimonie d’un économe. Les millions dilapidés hier devront se transformer en réalisations concrètes demain. Les Casablancais, las des promesses, n’attendent que ça : voir leur ville retrouver son lustre d’antan, ses passages historiques revenir à la vie, ses façades Art déco briller de mille feux.
Mais attention à ne pas tomber dans l’excès inverse. La précipitation serait tout aussi néfaste que l’immobilisme passé. Il faudra agir vite, certes, mais juste. Chaque décision devra être pesée, chaque chantier minutieusement planifié. Le patrimoine ne s’accommode pas de l’à-peu-près.
Et quid de la voix des Casablancais dans tout ça ? Trop longtemps spectateurs impuissants du délitement de leur héritage, ils aspirent à devenir acteurs de sa renaissance. L’ère de la gouvernance verticale et opaque est révolue. Place à la concertation, à l’intelligence collective. Le patrimoine n’est pas l’affaire des seuls experts et bureaucrates, mais de tous ceux qui vivent et font vivre la ville.
Houda BELABD
L’après Casa Patrimoine s’annonce comme un défi titanesque, un Everest administratif et culturel à gravir. Mais c’est aussi une opportunité unique de réinventer la gestion du patrimoine urbain, de réconcilier passé et futur, pierre et citoyens. Casablanca, cette belle endormie aux atours Art déco, n’attend que ça : se réveiller enfin de sa longue léthargie patrimoniale et retrouver sa place de joyau architectural du Royaume.
Le compte à rebours est lancé. La prochaine SDL, quelle qu’elle soit, n’aura pas le luxe de l’erreur. Les Casablancais veillent, et leur patience a des limites. À bon entendeur…
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