La croissance de l’économie marocaine serait en légère baisse en 2024, autour de 3% contre 3,3% en 2023. Le secteur agricole restera un facteur de volatilité pour la croissance dans les années à venir, selon le groupe français Crédit Agricole.
« La croissance de l’économie marocaine est attendue en légère baisse en 2024, autour de 3% contre 3,3% en 2023.Mais au-delà de la conjoncture, des enjeux plus structurels se dessinent à moyen-terme : celui d’une exposition à un risque climatique qui se réalise, celui d’un modèle de développement en panne qui a entraîné un essoufflement de la croissance (de 4,3% en moyenne sur 2004-2014 à 2,4% sur 2015-2023), et celui d’un chômage élevé qui accélère la temporalité des réformes », souligne la Direction des études économiques du groupe français Crédit Agricole dans son analyse «Perspectives», publiée lundi 16 septembre.
Ce sont autant de problématiques qui sont au cœur du plan de réformes d’ampleur lancé par le gouvernement dans son Nouveau modèle de développement (NMD), ajoute l’Institution.
Pourtant, selon ses experts, la croissance sera soutenue, à court terme, par une amélioration de la conjoncture nationale.D’abord, l’inflation est fortement retombée. Elle avait atteint un pic de 10% en février 2023, alimentée par l’augmentation des prix de l’énergie à partir de mars 2022 et aggravée par un épisode de sécheresse sévère qui avait fait s’effondrer la production agricole de 12% en 2022.
Selon les économistes du groupe Crédit Agricole, une normalisation de ces conditions depuis 2023 a entraîné un fort recul de l’inflation. Elle est attendue autour de 2,5% en 2024 contre 6,1% en 2023 (6,6% en 2022), ce qui va soutenir la consommation privée.
Ensuite, poursuit la même source, cette baisse de l’inflation a permis à la banque centrale de mettre fin au cycle de resserrement monétaire en juin, baissant les taux de 3% à 2,75% (la première baisse depuis 2022).
Le tourisme et les phosphates restent dynamiques
Autre élément soulevé dans l’étude est que l’évolution de la demande extérieure est plus incertaine, notamment celle de l’Europe, le premier partenaire commercial du Maroc. Cependant, les secteurs du tourisme et des phosphates restent dynamiques.
Par ailleurs, les secteurs automobile et des composants électroniques sont soutenus par l’élan de diversification industrielle marocaine, dont semble témoigner la croissance des exportations de ces secteurs ces dernières années.
Le manque de pluie devient chronique
La croissance reste cependant contrainte par une nouvelle récession agricole (-5% au premier semestre). Pour les économistes du groupe Crédit Agricole, « ce facteur inquiète, car il ne s’agit plus d’un choc exogène pour l’économie marocaine ».
Ils font savoir, à ce sujet, que la période 2019-2022 a été la plus sèche enregistrée depuis les années 60, et le manque de pluie devient chronique. « Or, le secteur primaire contribue à 12% du PIB marocain. Les récessions agricoles récentes s’impriment donc fortement sur la croissance dont la volatilité augmente.L’enjeu est encore plus important pour l’emploi, car le secteur absorbe environ 38% de la main-d’œuvre, et même 50% de la main-d’œuvre féminine, dont la participation est déjà très faible (<25%). L’impact social est donc majeur. En 2023, à la suite de l’épisode de sécheresse de 2022, le chômage a atteint 13%, un niveau jamais vu depuis les années 90 », estiment-ils.
Pourtant, soulignent-ils, le gouvernement a engagé des réformes pour soutenir le secteur – notamment le développement d’infrastructures hydro-agricoles, et des mesures d’économie d’eau. « Toujours est-il que le secteur agricole restera un facteur de volatilité pour la croissance dans les années à venir. Au vu de l’impact sur l’emploi, cette dimension accélère le besoin de transformation de l’économie marocaine, pour réduire les contraintes à la croissance et favoriser la création d’emploi dans d’autres secteurs.
C’est tout l’enjeu du Nouveau modèle de développement lancé en 2021, souligne la Direction des études économiques du groupe français Crédit Agricole,
Dans un premier temps, poursuit la même source, un exercice de consultation a permis de poser le diagnostic. Il identifie les « principaux nœuds à l’origine de l’essoufflement de l’élan de développement ». On trouve, notamment, des indicateurs du secteur privé qui font apparaître une faiblesse de l’entrée et sortie des entreprises dans l’économie marocaine. Cela résulte, selon l’enquête, d’une réglementation lourde, souvent appliquée de marnière hétérogène.
Les règles du jeu du milieu des affaires s’en trouvent brouillées et compliquées, ce qui pèse sur la dynamique entrepreneuriale et encourage, bien souvent, l’informalité.
Le système d’incitations économiques non optimisé
Autre grand constat dressé par la Direction des études économiques du groupe français Crédit Agricole, un système d’incitations économiques non optimisé favorise certains secteurs traditionnels (typiquement la construction), ce qui désincite l’investissement dans des secteurs porteurs de diversification et de productivité.
Enfin, une régulation parfois insuffisante autorise des pratiques anticoncurrentielles, qui renforcent les postures oligopolistiques.
Finalement, tous ces éléments entraînent, d’après le groupe français Crédit Agricole, une économie de rentes, à l’origine d’une certaine inertie de la structure économique. Face à ces constats, les réformes s’accélèrent, notamment la charte d’investissement, adoptée en 2022, qui a pour objectif d’inciter 550 milliards de dirhams d’investissements d’ici 2026 (30% du PIB), de créer 500.000 emplois (4,7% de l’emploi actuel).
Les autorités visent plus largement de porter l’investissement privé à 2/3 de l’investissement total,contre 1/3 actuellement.
Cette charte constitue justement une refonte complète du système d’incitations, au profit de la diversification.
Cela sera appuyé par des réformes du climat des affaires, pour renforcer la régulation et prévenir les pratiques anticoncurrentielles.
L’éducation et l’inclusion au centre des réformes
La Direction des études économiques du groupe français Crédit Agricole souligne, en outre, que l’éducation et l’inclusion apparaissent au centre des réformes. « L’offre d’éducation au Maroc a été élargie et généralisée, mais cela s’est fait parfois au détriment de la qualité, qui reste en dessous des standards internationaux, selon l’appréciation de Moody’s dans son dernier rapport. Il y a également un problème d’alignement des cursus universitaires avec le marché du travail. La Banque Mondiale note, à ce propos, qu’un diplôme d’université multiplie par cinq les chances de chômage.Le système éducatif est donc un axe central du programme de réforme », note la Direction des études économiques du groupe français Crédit Agricole.
Elle indique, enfin, que le Maroc s’est engagé dans une refonte du système de protection sociale, proposant une protection universelle, qui est un pas clé pour améliorer la résilience des populations vulnérables et une incitation à la formalisation de l’économie.
Pour conclure, les analystes de la banque estiment que, malgré tout, le Maroc a su faire preuve d’une efficacité reconnue dans la gestion de ses politiques publiques, lui permettant d’assurer une certaine stabilité macroéconomique à l’épreuve des chocs (Covid, guerre en Ukraine, tremblement de terre…). « C’est un gage de confiance important pour les investisseurs, qui a notamment permis un historique ininterrompu d’accès aux marchés internationaux, et un coût de dette faible, éléments qui assoient sa soutenabilité », souligne-t-on.
Le Maroc fait preuve d’une grande attractivité commerciale
Le Maroc a été classé troisième pays le plus attractif pour le commerce en Afrique, selon le récent rapport Country Brand Ranking de l’agence de commerce et de branding Bloom Consulting.
Le rapport, dans son édition 2024-2025, note que le bon développement du Maroc dans ce domaine est soutenu par un boom de la demande pour le commerce numérique et l’activité en ligne, ainsi que par de bonnes données en termes d’investissements directs étrangers (IDE), rapporte le média espagnol Atalayar.
Seuls l’Afrique du Sud et le Nigeria dépassent le Royaume dans le classement, ce qui témoigne de la forte performance du Maroc dans ce secteur.
Le rapport souligne l’ascension du Maroc en tant que centre commercial clé sur le continent, étant donné que d’une année à l’autre, il a gagné une place dans le classement pour atteindre la troisième place, ce que le Royaume a réalisé pour la première fois dans le classement présenté par Bloom Consulting.
Le rapport souligne comme facteurs en faveur du Maroc dans ce saut qualitatif la stabilité des investissements directs étrangers et l’activité commerciale numérique croissante.
« Le Maroc se hisse pour la première fois dans le Top 3 régional, soutenu par la stabilité de ses investissements directs étrangers, la demande numérique de D2 et la performance en ligne. L’amélioration de son score de notation et de sa présence sur les médias sociaux, malgré le maintien d’une note CBS (A), reflète l’influence croissante du Maroc et son positionnement stratégique dans le commerce africain », explique le rapport.
Le Maroc devance désormais l’Égypte, qui occupe la quatrième place, et le Ghana, qui occupe la cinquième place. En effet, le rapport note que le Ghana « n’a pas été en mesure de rivaliser avec les améliorations observées au Maroc et en Égypte ».
Energie éolienne, un pilier stratégique
Aujourd’hui, le Maroc a considérablement augmenté sa capacité éolienne installée, ce qui en fait un leader dans la région de l’Afrique du Nord. Cette croissance s’est accélérée grâce aux investissements directs étrangers (IDE) et à des projets stratégiques, tels que le parc éolien de Tarfaya, l’un des plus grands d’Afrique, ressort-il d’un récent rapport de l’OCDE.
L’énergie éolienne représente une part importante de la capacité de production d’énergie renouvelable du Maroc et continue de se développer pour atteindre les objectifs nationaux ambitieux en matière d’énergie.
Le rapport de l’OCDE souligne que si les énergies renouvelables représentent actuellement environ 9% de l’approvisionnement énergétique total, la majeure partie provient de sources éoliennes. Le Maroc a fait de ce secteur une priorité stratégique dans sa transition vers un modèle économique plus vert, en cherchant à augmenter encore sa capacité installée.
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