Une fusillade au siège moscovite de Wildberries, tout près du Kremlin, a fait mercredi au moins deux morts, ont rapporté les agences de presse russes, sur fond de désaccord profond entre le couple fondateur du géant russe du e-commerce, en instance de divorce.
Tatiana Bakaltchouk, la femme la plus riche de Russie, et Vladislav Bakaltchouk se déchirent depuis plusieurs semaines autour du contrôle de la société, dont elle détient 99% et son mari 1%.
L’histoire est retentissante et rare, d’autant que la fusillade a eu lieu à quelques centaines de mètres du Kremlin, en plein coeur de Moscou, dans un quartier ultra-sécurisé.
« Un deuxième agent de sécurité du bureau de Wildberries blessé lors de la fusillade est décédé », a indiqué l’agence Interfax, citant une source au sein du site de vente en ligne.
L’agence d’Etat Ria Novosti rapporte aussi deux morts, citant une source policière, alors que Tatiana Bakaltchouk avait annoncé un peu plus tôt le décès d’un « agent de sécurité (…) à la suite de l’attaque armée ».
Il n’était pas clair dans l’immédiat si ces deux morts faisaient partie ou non des trois blessés initialement annoncés par la patronne de Wildberries en milieu de journée.
Des agences de presse russe ont également fait état d’arrestations, mais les autorités russes n’ont jusqu’ici fait aucun commentaire sur cette affaire.
D’après le récit de Mme Bakaltchouk sur Telegram, son mari a initialement « tenté de pénétrer dans les bureaux de Wildberries à Moscou », accompagné de deux anciens responsables du groupe et d’individus en armes.
Le groupe Wildberries a affirmé dans un commentaire à l’AFP que « les hommes armés qui accompagnaient Vladislav Bakaltchouk ont (ensuite) été les premiers à ouvrir le feu », « blessant » des policiers et des agents de sécurité.
L’époux a, de son côté, tenu un récit des faits radicalement différent.
M. Bakaltchouk, 47 ans, a affirmé sur Telegram que la sécurité a d’abord « refusé de (les) laisser passer », avant qu' »une fusillade (n’)éclate », blessant ses collaborateurs selon lui.
« Mes hommes n’étaient pas armés, nous étions protégés par des policiers. Les premiers coups de feu sont venus de l’intérieur du bâtiment », a-t-il affirmé, évoquant « la panique » des gens sur place et « de la fumée partout ».
M. Bakaltchouk a assuré s’être rendu au siège « pour négocier l’arrêt de la construction d’entrepôts », un des points de discorde avec sa femme, qui a, elle, juré que « personne n’avait convenu de discussions » mercredi.
Une journaliste de l’AFP a vu sur place plusieurs voitures de police et des ambulances avec les gyrophares allumés devant le siège de l’entreprise.
Wildberries, fondé en 2004, est une success story du e-commerce russe d’avant-conflit en Ukraine, qui a fait de Tatiana Bakaltchouk, 48 ans, la femme la plus riche de Russie. Sa fortune est estimée à 7,9 milliards de dollars par Forbes.
Fait rare parmi les richissimes russes, Tatiana Bakaltchouk n’appartient pas au cercle d’oligarques historiques qui ont pris le contrôle des grands groupes étatiques dans le pays dans les années 1990.
Le couple Bakaltchouk, qui a eu sept enfants ensemble, est en guerre ouverte depuis des semaines et depuis que Wildberries a annoncé en juin un projet de fusion avec le groupe de publicité Russ, qui pèse beaucoup moins dans l’économie nationale.
Le Kremlin, qui y voit la possibilité de créer un géant russe à même de concurrencer à terme Alibaba et Amazon, soutient cette union, poussée par Tatiana Bakaltchouk, tandis que son mari s’y oppose fermement.
Vladislav Bakaltchouk s’en est d’ailleurs plaint ouvertement en juillet au dirigeant Ramzan Kadyrov en Tchétchénie, où sa femme est née.
Le chef tchétchène, connu pour ses méthodes brutales et ses intérêts économiques multiples, a pris fait et cause pour l’époux, qualifiant la fusion de « fraude à grande échelle » qui finit « entre de mauvaises mains ».
Le dirigeant autoritaire a ainsi assuré dans une vidéo en ligne qu’il allait « ramener (Mme Bakaltchouk) dans la famille ».
La PDG du groupe a officiellement demandé le divorce fin juillet. Selon la presse russe, le mari réclame le contrôle de 50% des actions de Wildberries.
Le site de vente en ligne Wildberries, présent dans plusieurs pays d’ex-URSS, revendique sur son site plus de 10 millions de commandes quotidiennes et 30 millions d’utilisateurs chaque jour.
L’Opinion Maroc – Actualité et Infos au Maroc et dans le monde.Read More