Décidément, il est le gourou d’une secte dont il est l’unique adepte. Malek dit, en substance, dans ce texte violemment doux : « A Tanger … J’ai d’abord vu la ville/Semblant narguer l’Espagne/Accrochée comme un cil/Aux yeux de la montagne/A Tanger …J’ai vu cette lumière/Qui ne faiblit jamais/Qui jaillit de la mer/Pour inventer l’été/A Tanger …J’ai marché dans les rues/Et ma tête était claire/Au milieu des cohue/Et des parfums amers/A Tanger …J’ai vu le regard d’aigle/De ce peuple vaillant/Enfanté par des siècles/De mélanges et de sang/A Tanger …J’ai goûté la tiédeur/Du tout petit matin/Dans la brume qui meurt/En perles sur les mains/A Tanger …J’ai entendu l’appel/Qui déchire la nuit/Comme un souffle du ciel/Sur la ville endormie (…) ». Beau comme un immense bleu dans lequel on a envie de se noyer. Tanger garde-t-elle cette trame poétique qui jonche d’antan ses murs, ses ruelles montantes et descendantes ? Peut-être bien, mais uniquement dans des mémoires continuellement en partance.
Tanger d’aujourd’hui convoque les larmes, se fait copine avec la mélancolie. L’été tangérois dont parle Malek avec luminosité semble rendre l’âme. Pour jouir des derniers effluves de ce Tanger historique, il faudrait être sur les maigres listes de farouches gardiens d’un temple en grosse décrépitude. La cité qui « nargue l’Espagne » n’a finalement d’yeux que pour l’Ibérie. Tanger est belle, l’hivers en jure. Arpenter ses rues et ses multiples histoires pendant qu’on nage debout sous de bien beaux flots d’eau, cela ressemble à une grâce divine, salvatrice et stimulante. Bref, A Tanger…