a
a
HomeActualités du NetEaux saumâtres : Baraka fixe le cap des eaux non-conventionnelles [INTÉGRAL]

Eaux saumâtres : Baraka fixe le cap des eaux non-conventionnelles [INTÉGRAL]

Eaux saumâtres : Baraka fixe le cap des eaux non-conventionnelles [INTÉGRAL]

Face à la situation hydrique alarmante que connaît le Royaume, le département de tutelle travaille sur son réseau de stations de déminéralisation des eaux saumâtres afin de mettre à profit des ressources non-conventionnelles peu valorisées.

Dans Son discours du Trône, SM le Roi Mohammed VI a alerté sur les réserves hydriques du Royaume et ses eaux souterraines, suite à six ans de sécheresse consécutifs. Il a ainsi appelé à accélérer les chantiers permettant de réduire le choc hydrique. Il s’agit en l’occurrence des stations de dessalement de l’eau de mer, afin d’assurer la mobilisation annuelle de plus de 1,7 milliard de mètres cubes. « À l’horizon 2030, le Maroc pourra ainsi couvrir plus de la moitié de ses besoins en eau potable à partir de ces stations, irriguer d’importantes superficies agricoles et renforcer de cette manière sa sécurité alimentaire », a ajouté le Souverain. 

En effet, ce chantier se confirme comme une approche stratégique qui se complète par ailleurs par la mise en place de stations mobiles ciblant aussi bien le littoral (dessalement) que les ressources continentales en eaux saumâtres (déminéralisation). Aujourd’hui, le Royaume dispose de 200 stations mobiles de dessalement et de traitement des eaux minérales, distribuées dans toutes les provinces et zones rurales, outre les projets de fontaines et de barrages collinaires.
 
Selon ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, les nouvelles unités mobiles de dessalement sont destinées à Kelaât Sraghna, Zagora, Taza, Sidi Kacem, Khémisset, Settat, Berrechid, Boujdour, Khénifra, Tinghir et Tan-Tan, « afin d’équiper ces régions pour faire face aux difficultés que nous vivons actuellement ». Cette planification prend en considération les orientations Royales, appelant à prendre des mesures urgentes et novatrices afin de prévenir la pénurie d’eau dans les régions fortement déficitaires.
 
En mars dernier, le ministre de l’Equipement et de l’Eau avait déclaré que les nouvelles stations « s’ajouteront à la station qui sera installée à Kassita dans la région d’Al-Hoceima, ainsi qu’aux 3 grandes unités mobiles de dessalement dont la capacité est de 100 litres par seconde, qui seront pour leur part positionnées à Taghazout et dans le Nord de la région d’Agadir ».
 

Cap sur l’eau saumâtre
 
Par ailleurs, Baraka prête une attention particulière aux eaux saumâtres, qui, malgré leur abondance dans le territoire marocain, demeurent peu valorisées. Ainsi, les efforts entrepris pour la déminéralisation et la valorisation de ces ressources s’inscrivent dans le cadre d’un « programme majeur qui sera l’un des programmes phares du plan d’urgence et qui permettra de contribuer à répondre aux besoins des provinces du Royaume », selon le ministre. Un travail important est actuellement réalisé à travers une coopération entre le ministère de l’Intérieur et les Agences des Bassins Hydrauliques afin de cartographier les zones où existent des ressources en eaux saumâtres, ce qui permettra de positionner les unités mobiles de dessalement. A noter qu’un des projets avancés de déminéralisation des eaux saumâtres a été inauguré en novembre dernier dans la région de l’Oriental. La station en question est exploitée par la Régie autonome intercommunale de distribution d’eau et d’électricité (RADEEO) et met à profit des eaux saumâtres provenant des forages de la ville d’Oujda.
 
Solutions adaptables
 
Cette station permet ainsi de faire face à la problématique de salinité qui affecte les eaux de la nappe phréatique locale. Ce projet, dont les travaux ont été lancés en novembre 2022 pour un coût global de 46,5 millions de dirhams, permet d’avoir un débit de 150 litres par seconde d’eau déminéralisée qui s’ajoute aux ressources hydriques provenant du barrage Machraa Hammadi par le canal de traction qui s’étend sur une longueur de 80 kilomètres et qui fournit environ 50% des besoins annuels en eau potable de la ville. Stations fixes dédiées à la déminéralisation des eaux saumâtres continentales, stations mobiles de grande taille positionnées dans une zone littorale ou encore petites stations monoblocs compactes, les solutions mises en place par le Royaume pour mobiliser des ressources hydriques alternatives se diversifient et s’adaptent aux besoins de chaque région. Gageons que les chercheurs marocains ne tarderont pas à concevoir des solutions innovantes qui pourront être produites localement.
 
Omar ASSIF

3 questions à Abdeljebbar Qninba : « Le degré de salinité de l’eau sera déterminé par la nature du milieu qu’elle a traversé »
Quelles sont les caractéristiques des eaux qualifiées de saumâtres ?
On parle d’eau saumâtre lorsque la salinité de cette eau est comprise globalement entre 2 et 15 grammes de sel par litre d’eau. La terminologie actuelle de mesure de la salinité de l’eau se réfère plus au poids de l’eau et donc il est question d’un degré de salinité situé entre 2/1000 à 15/1000 (un litre étant équivalent à 1000 grammes). Au-delà de ce degré de salinité, on parle plutôt d’eaux salées. La salinité de l’eau de mer, par exemple, est en moyenne de 35/1000 et c’est bien évidemment une moyenne puisque la salinité varie selon les mers et les océans. 
 

Comment se forment les eaux salées ou saumâtres dans un milieu continental ?

En milieu continental, on trouve bien évidemment des eaux douces, comme on trouve des eaux saumâtres, salées ou encore très salées. Dans une Sebkha, on peut parfois trouver une salinité qui est (deux ou trois fois) plus forte que l’eau de mer. Les eaux saumâtres en milieu continental peuvent être superficielles (dans un oued, un ruisseau ou un lac) ou souterraines. Généralement, ces eaux deviennent saumâtres lorsqu’elles traversent des terrains (en surface ou en profondeur) qui sont salifères. Par exemple, si une eau traverse un terrain du Trias, sa salinité va augmenter parce que ce genre de terrain a été formé dans un milieu très salé et continue à ce jour à être très chargé de sel. On a également les eaux qui se salinisent ou qui deviennent saumâtres parce qu’elles ont traversé des terrains basaltiques qui sont également de nature à libérer du sel. C’est le cas également pour l’eau qui traverse certaines roches, notamment le sel gemme et le gypse. Le degré de salinité de l’eau sera déterminé par la nature du milieu qu’elle a traversé et la durée qu’elle y a passée.
 

Faut-il craindre que les eaux saumâtres souterraines se mélangent avec l’eau douce de la nappe phréatique ?

Dans la nature, il existe bien sûr des cas où les eaux douces et saumâtres se mélangent. Il s’agit d’équilibres hydrologiques qui se font naturellement depuis la nuit des temps. Par exemple au niveau des sources d’Oued Oum Errabie, on trouve sur le même niveau (mais à des expositions différentes) des sources d’eau douce ainsi que des sources d’eau salée. Leurs eaux se mélangent en aval dans l’oued. Certaines nappes de surface qui sont alimentées depuis très longtemps par des eaux salées, deviennent entièrement saumâtres, voire salées. Il existe toutefois des phénomènes inquiétants de salinisation qui peuvent être causés par la surexploitation des eaux souterraines d’une nappe littorale. C’est le cas par exemple dans la nappe du Souss, qui est menacée par l’intrusion d’eau de mer suite à la baisse drastique des niveaux des eaux souterraines.

Déminéralisation : Une technique ancestrale
Déminéraliser l’eau saumâtre et dessaler l’eau de mer sont des idées qui ne datent pas d’hier. Durant la période de l’Antiquité, les marins confrontés à la problématique d’approvisionnement en eau à bord des bateaux avaient déjà trouvé des solutions en faisant bouillir de l’eau de mer pour en extraire de l’eau non salée par condensation de la vapeur produite. Il a cependant fallu attendre le 18ème siècle pour que les chercheurs commencent à explorer des procédés permettant d’augmenter la production, améliorer la pureté de l’eau ou économiser l’énergie. Ce n’est qu’au début du siècle dernier que sont apparus les premiers procédés industriels de distillation. Le procédé appelé « Osmose inverse », dont le principe est par ailleurs encore d’actualité aujourd’hui, a été pour sa part mis au point en 1959 à l’Université de Californie. Il s’agit d’un procédé membranaire dans lequel l’eau douce est extraite de l’eau salée à travers une membrane semi-poreuse, en appliquant une pression.

Chantiers stratégiques : Baraka passe à la vitesse supérieure
Vendredi dernier, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a présidé une réunion à la Direction générale de l’ingénierie hydraulique, consacrée à l’examen des projets hydrauliques qui seront mis en œuvre conformément aux Hautes orientations contenues dans le discours Royal à l’occasion de la Fête du Trône.

Lors de cette réunion, Baraka a exhorté les directeurs des Agences des Bassins Hydrauliques à élaborer un plan d’action précis pour atteindre les objectifs tracés. Il ainsi appelé à la mobilisation de toutes les parties concernées pour réaliser les projets programmés en application des Hautes orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Il a dans ce sens rappelé les objectifs énoncés par le Souverain, dont la satisfaction de 100% des besoins de la population en eau potable, tout en assurant 80% des besoins en eau destinée à l’irrigation. Ces projets concernent de manière plus spécifique le parachèvement du programme de construction des grands barrages et l’accélération de leur mise en œuvre en fonction des nouvelles priorités, ainsi que des projets de transfert d’eau entre les bassins de Laou, Loukkos, Sebou et Oum Er-Rbia vers le barrage Al-Massira.

Le ministre a également invité les parties prenantes à la mise en œuvre rapide des projets qui portent sur l’interconnexion des barrages afin de permettre une gestion intégrée et fluide des ressources en eau au niveau des bassins, appelant à l’élaboration d’un programme intégré pour la construction de stations de dessalement de l’eau de mer, en collaboration avec l’Office National de l’Électricité et de l’Eau potable (ONEE) et l’ensemble des intervenants. Il s’agit aussi d’augmenter le volume des eaux usées traitées d’ici 2030 et d’inciter les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et du tourisme à les utiliser, en coordination avec le ministère de l’Intérieur.