Echanges d’expériences entre fédérations, discussions entre techniciens spécialistes de sports pourtant dissemblables, comme l’équitation et l’athlétisme: ces passerelles parfois contre-intuitives participent à la bonne tenue de la délégation française, qui a déjà battu le record de podiums de Pékin-2008.
Inscrit pour la première fois au programme olympique, le kayak cross qui a distingué lundi l’Ardéchoise Angèle Hug offrait quatre chances de médailles au clan français, autant que la totalité des épreuves traditionnelles de slalom.
Mais contrairement à celles-ci, en cross, il ne s’agit plus de se mesurer en contre-la-montre mais en confrontation directe, à quatre simultanément dans le bassin.
Alors, pour remplir les premières lignes de palmarès de cette page vierge, Frédéric Rebeyrol, le chef de projet du kayak cross français, a puisé ailleurs.
« On a la configuration du ski cross et du BMX », remarque-t-il immédiatement après sa nomination, comme il l’a raconté à l’AFP.
La similitude est particulièrement forte avec le ski cross. « C’est un peu la même configuration que le ski cross une fois qu’on a sauté de la rampe de départ: s’extraire du peloton et se porter tout de suite à l’avant peut-être une stratégie payante », décrypte-t-il.
Ce fut aussi la tactique gagnante de Joris Daudet, Sylvain André et Romain Mahieu, les trois acteurs de l’historique podium 100% bleu du BMX Racing vendredi dans le stade de Saint-Quentin.
« J’ai travaillé avec l’entraîneur national de BMX, Julien Sastre, et j’ai été en contact avec Michel Locatelli, responsable du ski cross français quand ils ont fait le triplé à Sotchi (aux Jeux d’hiver de 2014, NDLR) », explique Frédéric Rebeyrol.
« On a échangé sur des stratégies, notamment de prise de décision en situation de course », détaille-t-il. « Une fois que la course est lancée, comment défendre sa position ou attaquer l’adversaire. On a mutualisé aussi sur la récupération: en slalom, il y a une manche toutes les deux heures mais en cross, c’est toutes les vingt minutes. »
Autre révolution: alors qu’en slalom le kayakiste dispose d’une plage de plusieurs secondes pour s’élancer, en cross, le départ est lancé, comme sur une piste d’athlétisme. Où les spécialistes du kayak cross sont allés chercher une autre source d’inspiration.
« Notre signal à nous c’est +Ready ? Go+. Entre ces deux mots, on n’a pas le droit de bouger. Pour les sprinteurs, un micro-mouvement provoque un faux départ, nous c’est pareil », expliquait en juin la nouvelle vice-championne olympique Angèle Hug à l’AFP.
Association plus étonnante, l’athlétisme a infusé au sein de l’équipe de France de saut d’obstacles, médaillée de bronze par équipes avant un autre podium peut-être en individuel mardi.
« On s’est rapprochés de la physionomie de l’entraînement du 400 m haies en échangeant avec l’entraîneur français Olivier Vallaeys (le coach du hurdler Wilfried Happio, sélectionné pour les JO, NDLR) », indique à l’AFP la directrice technique nationale de la Fédération française d’équitation, Sophie Dubourg.
« Comme l’effort est de 75 à 90 secondes, les cavaliers considéraient qu’il n’y avait pas tellement besoin d’endurance chez leurs chevaux », explique-t-elle.
Or, poursuit-elle, le spécialiste du 400 m haies « a montré que les lactates pouvaient être plus recyclés via le réservoir aérobie (quand l’organisme fabrique de l’énergie en utilisant l’oxygène via la respiration, par opposition à l’anaérobie, NDLR) ».
« Il leur a aussi détaillé la saison type pour être au pic de forme fin juillet avec un exposé des exercices », ajoute Sophie Dubourg, qui dit avoir opté pour le 400 mètres haies car « c’était l’épreuve la plus proche » du saut d’obstacles.
Autre passerelle, handballeurs et rugbymen, que rapprochent les gabarits et la dimension combat physique de leurs sports, se sont aussi croisés.
A l’occasion de séminaires organisés par l’Agence nationale du sport (ANS), le sélectionneur des Bleus du « ballon collant », Guillaume Gille, a échangé avec son homologue de l’ovale, Fabien Galthié.
« Il y a des ponts à faire entre des sports pas jumeaux mais très proches, sur la notion de connexion, de faire ensemble », faisait remarquer +GG+ l’an passé dans un entretien accordé à l’AFP au tout début de la Coupe du monde.
« Je suis toujours les aventures des sports co’ français, c’est riche d’enseignements de voir comment ils traitent certaines problématiques, les moments de grandes performances ou de déconvenues. »
Les enseignements du rugby, éliminé de la Coupe du monde en quart de finale l’automne dernier, lui épargneront peut-être la même mésaventure mercredi face à l’Allemagne au même stade de la compétition.