Après 46 secondes de son huitième de finale et un direct au visage adressé par l’Algérienne Imane Khelif à Villepinte, au nord de Paris, l’Italienne Angela Carini (-66 kg) lève le bras, se retourne vers son coin à qui elle signifie qu’elle veut arrêter.
« Je suis montée sur le ring pour combattre. Je ne me suis pas rendue mais un coup de poing m’a fait trop mal et j’ai dit +Ça suffit+ », a déclaré l’Italienne, citée par l’Agence Ansa. « Je ne suis personne pour juger ou prendre une décision, si cette femme est ici, il y a une raison. »
Admise dans le tournoi par le CIO, Khelif a reçu d’Algérie un soutien unanime. Citée par l’agence officielle APS, elle s’est réjouie de son « succès rapide » et a expliqué rester « concentrée sur (son) objectif d’une médaille olympique ».
Mais les images de l’abandon ont déclenché une vive controverse. Sur X, la Première ministre italienne Giorgia Meloni a dénoncé « un combat qui n’était pas sur un pied d’égalité », ajoutant ne pas être « d’accord avec le CIO ».
Le débat s’est aussi invité dans la campagne présidentielle aux Etats-Unis, où plusieurs responsables républicains ont désigné l’Algérienne comme étant un homme. « Je garderai les hommes hors du sport féminin! », a écrit Donald Trump en majuscule sur son réseau Truth Social.
En légende d’images du combat, un utilisateur du réseau X a écrit que la candidate démocrate « Kamala Harris soutient ceci ». « Vrai. Ou alors qu’elle le démente », a renchéri le milliardaire Elon Musk, soutien de Donald Trump.
En acceptant la participation d’Imane Khelif dans les épreuves féminines de boxe, le CIO a pris une position inverse à celle de la Fédération internationale de boxe (IBA), qui l’avait écartée des Mondiaux à New Delhi en mars 2023 après qu’elle avait échoué à répondre aux tests d’éligibilité à une participation en catégorie féminine.
Selon la fiche de la boxeuse algérienne fournie par le CIO, elle avait alors été disqualifiée en raison de « taux élevés de testostérone ».
Faux, a rétorqué jeudi l’IBA. Dans un communiqué, elle a expliqué que Khelif et la Taïwanaise Lin Yu-ting, qui est dans la même situation et devait combattre vendredi, « n’avaient pas été soumises à une analyse de la testostérone » mais à d’autres tests dont elle n’a pas précisé la nature.
Le combat de jeudi « est une parodie » et « ridiculise tous les sports olympiques », a réagi la légende du tennis Martina Navratilova, qui répondait à un post de l’autrice J.K. Rowling, dont les prises de position sur les questions de genre sont controversées: « Expliquez pourquoi vous acceptez qu’un homme batte une femme en public pour votre divertissement », avait écrit la créatrice de Harry Potter.
Durant son combat, Khelif a reçu le soutien appuyé du public de l’Arena de Villepinte, avec des drapeaux algériens dans les tribunes, a constaté une journaliste de l’AFP. Mais cet appui est aussi venu d’Algérie.
Le ministre algérien des Sports, Abderrahmane Hammad, a condamné « avec la plus grande fermeté les attaques infondées de certains médias étrangers » contre la boxeuse, et « les lâches tentatives de ternir sa réputation », dans un message posté mercredi sur X.
Autre soutien de poids, celui du CIO. Tous les olympiens « respectent les règles d’éligibilité aux compétitions », a répété jeudi Mark Adams, porte-parole de l’organisation mondiale. Il est établi que toutes les boxeuses alignées aux Jeux olympiques « sont des femmes », a-t-il assuré sans donner de noms. « De nombreuses femmes peuvent avoir un taux de testostérone égal à celui des hommes, tout en étant des femmes », a-t-il affirmé.
« Comme lors des précédentes compétitions olympiques de boxe, le genre et l’âge des athlètes se fondent sur leur passeport », a assuré en soirée le CIO dans un communiqué, fustigeant les « attaques » visant les deux boxeuses et la « décision arbitraire » de 2023 de l’IBA.
Le débat devait resurgir vendredi avec le combat de la Taïwanaise Lin contre l’Ouzbèke Sitora Turdibekova (-57 kg).
Les questions d’hyperandrogénie dans le sport ont fait irruption avec l’athlète sud-africaine Caster Semenya, 33 ans, multiple championne olympique et du monde, privée de compétition par la Fédération internationale d’athlétisme (World athletics) en raison d’un taux de testostérone particulièrement élevé.
World Athletics impose aux athlètes hyperandrogènes de faire baisser ce taux par un traitement hormonal pour pouvoir participer dans la catégorie féminine. Ce que refuse Semenya. Les procédures sont en cours.