Les hommes cadres de 35 ans peuvent espérer vivre 48,9 années supplémentaires –soit jusqu’à 83,9 ans en moyenne– contre 43,6 pour les ouvriers –soit jusqu’à 78,6 ans.
« Les cadres sont moins soumis aux risques professionnels (accidents et maladies du travail, conditions de travail pénibles, etc.) », explique la statisticienne Nathalie Blanpain.
« Quand vous vous levez à 04H00 du matin pour aller à 05H00 à l’usine, que vous changez d’horaires une semaine sur deux, ou que vous travaillez de nuit, forcément, ça joue », rapporte Jérôme Boussard, ouvrier de 45 ans et secrétaire général de la CGT sur le site du constructeur automobile Stellantis à Sochaux (Doubs).
« Le matin, c’est un marathon d’entrée de jeu sur la chaîne. Et si vous ajoutez à cela des pauses de seulement 20 minutes » pour manger, « ça ne favorise pas un bon état de santé », explique le retoucheur qualité.
« Quand les anciens partent en retraite ou pré-retraite, ils sont vraiment usés », ajoute-t-il, en évoquant également les risques d’accidents professionnels accrus pour les ouvriers.
Vent debout contre la réforme des retraites, qui a porté l’âge légal de départ à 64 ans, les syndicats avaient notamment souligné une prise en compte insuffisante de la pénibilité.
Selon Nathalie Blanpain, de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l’écart de longévité s’explique aussi par des différences de mode de vie.
« Les comportements de santé à risque, les moindres recours et accès aux soins, ou encore l’obésité sont moins fréquents chez les cadres que chez les ouvriers », souligne-t-elle.
Chez les femmes, si les cadres de 35 ans vivent en moyenne 53 ans de plus, ce chiffre n’atteint que 49,6 ans pour les ouvrières.
Depuis les années 1990, l’écart d’espérance de vie a diminué pour les hommes entre cadres et ouvriers; il était de sept ans sur la période 1991-1999. En revanche, il a un peu augmenté pour les femmes, passant de 2,6 à 3,4 ans. Des évolutions qui pourraient notamment être liées à la consommation de tabac, selon l’Insee.
Après les hommes cadres, les professions intermédiaires peuvent espérer vivre 47,4 ans supplémentaires au-delà de 35 ans, les agriculteurs 47,2 ans, les artisans et commerçants 46,4 et les employés 45,1 ans. Les inactifs, qui le sont souvent en raison de problèmes de santé ou d’invalidité, vivent de leur côté en moyenne seulement 34 ans supplémentaires (soit jusqu’à 69 ans).
Chez les femmes de 35 ans, les espérances de vie sont relativement proches dans la plupart des catégories sociales: entre 50 et 53 ans supplémentaires, sauf pour les ouvrières (49,6 ans) et inactives (45,8).
L’espérance de vie augmente avec le diplôme. Ainsi, à 35 ans, un homme diplômé du supérieur peut espérer vivre en moyenne deux ans de plus qu’un bachelier, 3,6 ans de plus qu’un titulaire de CAP ou BEP et huit ans de plus qu’un homme sans diplôme. Une femme diplômée peut de son côté vivre en moyenne 5,4 ans de plus qu’une non-diplômée.
Quelle que soit leur catégorie sociale, les femmes vivent plus longtemps que les hommes.
L’espérance de vie des ouvrières est ainsi légèrement supérieure à celle des hommes cadres (0,7 an de plus), même si leurs revenus sont plus faibles et leurs conditions de travail en général plus pénibles.
La raison ? Des comportements plus sains, comme une moindre consommation d’alcool et un meilleur suivi médical, notamment pendant leur vie féconde, note Nathalie Blanpain.
Par ailleurs, « leur durée de travail (hebdomadaire ou tout au long de leur vie) est plus faible, réduisant ainsi leur exposition à des risques professionnels », précise-t-elle.