Face à la colère opiniâtre des étudiants en médecine, le gouvernement a livré l’intégralité de son offre pour répondre à leur dossier revendicatif. Détails.
Nous sommes dans le flou absolu. Le spectre d’une année blanche continue de planer sur les Facultés de médecine au moment où les étudiants poursuivent le boycott des examens à la stupéfaction générale du grand public qui ne comprend pas comment ce bras de fer dure sans que les protagonistes ne parviennent à trouver un compromis. En dépit des réunions et des offres gouvernementales, les étudiants ne lâchent pas du lest.
Face aux critiques de plus en plus acerbes de l’opposition, le gouvernement, qui refuse catégoriquement le scénario d’une année sabbatique, tente de rassurer pour prouver qu’il garde encore la situation sous contrôle. Au Parlement, le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdellatif Miraoui, très critiqué pour sa gestion de ce dossier, est allé à la rencontre des députés, membres de la Commission des Secteurs sociaux, pour rendre compte de l’évolution des pourparlers.
Il était accompagné de son collègue, le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Ait Taleb, qui a également livré des détails inédits. Selon lui, les discussions avec les représentants des étudiants ont commencé dès décembre 2023 lorsque la colère avait commencé à s’exprimer. Une série de réunions a été tenue depuis lors jusqu’en juin 2024. Puis le gouvernement a ouvert un cycle de consultations avec les doyens des Facultés de médecine afin qu’ils livrent leurs doléances sur la réforme du parcours d’études. Ces réunions ont été tenues en présence du Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, qui a fini par intervenir personnellement. L’Exécutif a donné rendez-vous aux représentants des étudiants, vendredi 21 juin, lors d’une audience où l’ensemble des ministres concernés ont pris acte de leur dossier revendicatif.
Les points de discorde
En effet, la durée d’études que le gouvernement a réduite à six ans demeure une véritable pomme de discorde. Les étudiants la rejettent en bloc et n’en veulent pas alors que le gouvernement y voit une mesure normale et conforme à ce qui se fait à l’international. Pour l’instant, la tutelle veut appliquer cette réduction à tous les étudiants qui poursuivent leurs études actuellement de la première à la cinquième année. Cette mesure fait partie d’une restructuration de la formation médicale en trois phases, qui consiste à respecter un volume horaire de 5000 heures, dont la moitié vouée aux stages cliniques. Pas question d’y adhérer, assènent les étudiants qui reprochent à l’Exécutif d’avoir acté cette décision par décret sans concertation et, surtout, de ne pas avoir parachevé la conception de la réforme du troisième cycle. Là, le ministre de la Santé a tenté d’apporter des réponses lors de son échange avec les députés. Il a indiqué que le gouvernement est d’accord pour préserver la durée de résidanat à deux ans et créer un statut d’assistant, une sorte de statut particulier donnant droit à un salaire équivalent à l’indice salarial 509 et à l’ensemble des avantages et des indemnités prévus par la loi relative à la Fonction publique de santé. En plus, selon le ministre, le feu vert a été donné à l’accès direct à l’enseignement de médecine par concours sélectif au profit des assistants.
Résidents : Concessions gouvernementales
Pour leur part, les résidents bénéficieront de l’uniformisation de leurs statuts, y compris ceux en dehors des centres hospitaliers, avec la réduction de la durée d’engagement de huit à trois ans et la possibilité d’accéder à l’enseignement.
A l’instar des assistants, ils ont également droit à un salaire conforme à l’indice 509, en plus des indemnités. Aussi, le gouvernement a-t-il consenti à augmenter le nombre de postes budgétaires alloués aux concours de résidents dès 2025, et ce, en fonction du nombre des diplômés des deux premières promotions. Les résidents revendiquent également d’être titularisés dès le début de leur formation. Ce que le gouvernement a fini par accepter. En gros, sur ce point, l’ensemble des demandes des étudiants sont satisfaites.
Système de formation : Deux visions opposées
Concernant le nouveau système de formation, on est loin, là aussi, d’une convergence de vues. Les étudiants, qui ne parlent pas souvent d’une même voix, revendiquent la levée de toutes les restrictions sur les thèses, qu’elles soient théoriques ou techniques. Ils veulent tout simplement supprimer les restrictions sur le nombre de thèses purement théoriques et celui des cas étudiés dans la partie analytique. Ils demandent aussi la possibilité de passer directement le concours de spécialité après la fin des stages hospitaliers et des examens cliniques.
Pour ce qui est de la soutenance, il est préconisé, du côté des étudiants, de lever les obstacles temporels. En parallèle, ils insistent beaucoup sur la nécessité de numériser la gestion des thèses. Une proposition approuvée par le gouvernement qui se montre flexible sans avaliser toutes les demandes. L’Exécutif approuve l’idée d’augmenter le nombre de thèses encadrées simultanément par chaque professeur. Toutefois, sur la question des délais de soumission et de discussion des thèses de doctorat, il n’est pas question de lever toutes les restrictions. La tutelle concède, pour autant, un délai maximum de trois mois pour l’inscription et la discussion des thèses.
Quid des stages ?
S’agissant des stages, un point qui concentre une partie importante des revendications estudiantines, les étudiants appellent à ce que chaque Faculté abrite une commission de stages, à laquelle incombe de gérer tous les détails relatifs aux stages hospitaliers et de résoudre l’ensemble des problèmes qui en découlent. Ils veulent aussi que soit mise en place une charte de stage où sont définis expressément les objectifs escomptés et le quota de stagiaires attribué à chaque établissement hospitalier. Figure également parmi les doléances, la mise en place d’un cahier des charges qui définit la durée quotidienne des stages, celles des pauses, des gardes et des permanences… Le gouvernement, de son côté, préfère parler de charte nationale des stages en s’engageant à renforcer l’infrastructure hospitalière et l’encadrement au sein des hôpitaux, de sorte à améliorer les conditions de travail des étudiants pendant leurs stages. L’Exécutif compte élargir les zones de stages aux établissements relevant des groupements territoriaux de la santé en plus des CHU.