a
a
HomeActualités du NetÉconomie bleue : Comment amener la vision marocaine à bon port ? [INTÉGRAL]

Économie bleue : Comment amener la vision marocaine à bon port ? [INTÉGRAL]

Économie bleue : Comment amener la vision marocaine à bon port ? [INTÉGRAL]

Mercredi 5 juin 2024, s’est déroulée à Rabat une journée de « Dialogue national de haut niveau » autour de la thématique « Les défis de la gouvernance intégrée et la feuille de route pour la mise en œuvre de l’économie bleue au Maroc ».

« Présidé par le Département des Pêches maritimes, point focal de l’Initiative West MED, l’événement a attiré plus de 50 participants issus des principales institutions nationales s’intéressant au secteur maritime ou à l’économie bleue », souligne un communiqué des organisateurs. Cet événement intervient dans un contexte où le potentiel des activités maritimes économiques de l’économie bleue et les aspirations exprimées dans le Nouveau Modèle de Développement (NMD) du Maroc appellent à développer un cadre institutionnel national de l’économie bleue en vue de renforcer la coordination intersectorielle et entre les niveaux national et régional, ainsi que la planification intégrée entre les différents secteurs de l’économie bleue.

 

Cohérence et convergence
Ainsi, cette journée de dialogue nationale a été conçue comme un espace de concertation technique avancée puisque « les résultats des discussions de la journée seront utilisés pour contribuer aux orientations stratégiques permettant le développement d’une stratégie nationale cohérente et ambitieuse ». L’atteinte d’une cohérence et d’une convergence des visions est d’autant plus nécessaire que le Maroc se retrouve encore face à plusieurs défis pour construire son modèle d’économie bleue. Les organisateurs soulignent ainsi dans leur dossier de presse que « le manque de convergence et d’intégration entre les approches sectorielles de l’économie bleue peut conduire à une utilisation inefficace des ressources et, dans certains cas, provoquer des conflits entre les utilisateurs de l’espace, du foncier et des ressources. Le manque de coordination réduit également les possibilités d’investissement, ce qui compromet le potentiel de création d’emplois, particulièrement pour les femmes et les jeunes, ainsi que le développement des affaires pour des groupes tels que les pêcheurs artisanaux ».
 
Terrains d’entente
Le dialogue national a ainsi pu aboutir à plusieurs recommandations qui serviront de fondations pour la construction du modèle marocain de l’économie bleue. Il a par exemple été convenu que la gouvernance de l’économie bleue au Maroc devrait être soutenue par un mécanisme national robuste responsable de la co-conception et du suivi de la mise en œuvre de la stratégie nationale de l’économie bleue. « Ce mécanisme devrait être soutenu au niveau territorial par le déploiement de clusters maritimes côtiers régionaux. Le déploiement de deux clusters maritimes pilotes dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima devrait contribuer à cet objectif ». De même, les participants se sont accordés sur le fait que « l’alliance des clusters méditerranéens est une opportunité pour les régions côtières du Maroc de partager leurs expériences et de créer des connexions de mise en réseau et de partage de connaissances entre pairs ». Il a ainsi été proposé d’organiser un deuxième événement de haut niveau dédié aux clusters maritimes régionaux avec l’Association des régions marocaines qui pourrait être programmé en octobre 2024.
 
Cluster national
Les participants ont d’autre part souligné la nécessité de renforcer les capacités des acteurs institutionnels et privés dans les différents domaines de l’économie bleue. Ils ont également souhaité que leur représentation soit renforcée dans les groupes de travail thématiques de l’Initiative West MED, notamment en ce qui concerne le Green shipping, la planification de l’espace maritime et le tourisme durable. Le ministère de l’Economie et des Finances a pour sa part souligné la nécessité de cartographier les financements bleus existants et leurs critères d’éligibilité, afin de les partager avec les institutions publiques et privées et les autorités locales au Maroc. Enfin, en matière de recherche et d’innovation, les participants ont proposé la création d’un cluster national transversal sur les enjeux et défis de la connaissance scientifique du capital maritime et marin et des nouvelles technologies vertes liées à l’économie bleue. Une feuille de route qui laisse enfin se profiler un cap collectif pour que l’économie bleue du Maroc arrive à bon port.
Omar ASSIF

Trois questions à Jamil Ouazzani : « Il faut dresser un état des lieux de l’économie bleue au Maroc »
Comment l’économie bleue peut-elle être un vecteur de développement économique, pour le tourisme par exemple ?
Il y a beaucoup de paramètres qui ont changé dans le marché du tourisme. Les clients cibles aujourd’hui sont de plus en plus sensibles au tourisme durable. Il y a donc d’importants investissements qu’il faudrait faire pour répondre à cette nouvelle demande. Par exemple, le port de Tanger Ville a commencé à proposer ces dernières années des circuits de tourisme durable, qui sont très demandés par les croisiéristes, surtout de luxe. On arrive donc à augmenter le chiffre d’affaires et à accroître les marges de gain, avec peu de choses. C’est donc des circuits simples et faciles à reproduire. 

  Comment peut-on davantage tirer profit des ressources halieutiques d’une manière soutenable ?

 
La Méditerranée est une mer très polluée, ce qui menace gravement les ressources maritimes et aussi les sources de revenus du territoire national. Pour réduire le stress qui pèse sur la mer, il faut agir surtout sur le comportement de l’Homme. Par exemple, dans le cadre des campagnes de sensibilisation qu’on organise, on avait fait des labyrinthes sous-marins pour les enfants, et on demandait aux plongeurs de récupérer les déchets qui se trouvaient dans la mer. On trouvait des pneus, des bicyclettes, du plastique, etc. Pour prendre le cas des déchets plastiques, si en 2050, on continue encore à les utiliser de la même manière, dans les océans, on aurait plus de plastique que de poisson. Ce comportement tue ainsi tout l’écosystème marin. Il faut donc faire montre de vigilance pour pouvoir tirer profit des ressources maritimes de manière responsable. Au niveau du port, il y a des initiatives qui sont prises, notamment la mise en place des unités de valorisation des déchets, on prête attention au nombre de croisières accueillies par le port pour garantir des conditions de vie favorables à la faune marine et on va devenir pavillon bleu, ce qui impose plusieurs règles environnementales à respecter.
 

Quelles sont vos recommandations en vue d’une stratégie nationale pour l’économie bleue ?

 
Il faut tout d’abord organiser des assises pour dresser un état des lieux et discuter de ce qui doit être fait pour la promotion de l’économie bleue. Il y a donc un effort de communication à faire sur le sujet. Ensuite, il faut une conception claire de l’économie bleue. Il y a plusieurs définitions qu’il faudrait cadrer, car c’est ce qui va permettre d’élaborer des actions de sensibilisation ciblée et efficace, surtout auprès des jeunes et des enfants, qui sont les ambassadeurs de l’action écologique. De plus, il faut que la sensibilisation devienne partie intégrante des programmes scolaires au niveau de tout le territoire. Et finalement, il faut une coordination entre toutes les parties concernées du secteur pour éviter les chevauchements au niveau des décisions et des actions.
 
Recueillis par Rime TAYBOUTA

Atouts : Un capital marin stratégique et une vocation de puissance maritime
A la croisée des routes maritimes mondiales, avec ses deux façades maritimes méditerranéenne et atlantique de 3500 km, sa vaste zone économique maritime exclusive (ZEE) de 1,2 million de km2, ses diverses richesses minières et énergétiques considérables, le Maroc dispose d’un capital marin et côtier naturel stratégique et une vocation de puissance maritime au niveau continental et international. Au total, les zones côtières du Maroc contribuent à 59% de son PIB et fournissent 52% des emplois. A ce titre, l’économie bleue couvre l’éventail des secteurs socio-économiques et des politiques publiques et territoriales afférentes au domaine maritime et aux zones littorales nationales et se base sur une gestion éco-systémique des milieux marins et des ressources qui leur sont associées. Elle vise à promouvoir la croissance économique, l’inclusion sociale, l’innovation et la conservation ou l’amélioration des moyens de subsistance, tout en assurant l’application des principes de durabilité et de résilience des écosystèmes naturels des océans, des mers et des zones côtières.

Vision Royale : L’économie bleue en Atlantique entre durabilité et investissement
L’émergence d’une économie bleue durable, résiliente et inclusive et le rayonnement du Maroc comme hub maritime connecté au monde et à l’Afrique constituent une orientation stratégique de Sa Majesté le Roi, annoncée dans le discours du 7 novembre 2020, à l’occasion du 45ème anniversaire de la Marche Verte, dans lequel le Souverain a appelé à œuvrer pour le développement d’une véritable économie bleue dans les espaces marins nationaux. Dans Son discours à la Nation à l’occasion du 48ème anniversaire de la Marche Verte du 7 novembre 2023, le Souverain a indiqué que la façade atlantique du Maroc constitue une porte vers l’Afrique et l’Amérique,ce qui implique la nécessité de poursuivre l’action pour faire de la façade atlantique du Sahara un espace de complémentarité économique et d’essor, à travers la promotion d’une économie maritime au service des populations des provinces du Sud du Royaume. Sa Majesté a également souligné que « Outre la prospection poussée des ressources naturelles offshore, cette économie intégrée doit reposer sur l’investissement continu dans les filières de la pêche maritime, le dessalement de l’eau de mer à des fins agricoles, l’encouragement de l’économie bleue et le soutien aux énergies renouvelables ». Enfin, le Souverain a appelé à « l’adoption d’une stratégie dédiée au tourisme atlantique, dont la vocation serait de mettre en valeur les nombreuses potentialités de la région et, ainsi, de la consacrer comme une véritable destination pour la pratique du tourisme balnéaire et saharien ».