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Interview avec Maryam Bigdeli : « En cas d’effets secondaires des vaccins COVAX, nous transférons des indemnités aux Etats »

Interview avec Maryam Bigdeli : « En cas d’effets secondaires des vaccins COVAX, nous transférons des indemnités aux Etats »

Le débat sur les effets secondaires des vaccins anti-Covid refait surface. On en parle avec la Représentante de l’OMS au Maroc qui revient sur les mécanismes d’indeminsation dans le cadre du programme COVAX. Entretien.

Récemment, le Laboratoire Astra Zeneca a retiré son vaccin après avoir, quelques mois plus tôt, admis l’existence d’effets secondaires de son vaccin anti-Covid-19. À votre avis, est-ce que cet incident justifie qu’on relance le débat sur les effets secondaires des vaccins de façon générale ? 
Les effets secondaires de ce vaccin étaient déjà connus auparavant, et notamment La thrombose avec syndrome thrombocytopénique (TTS). Ils ont été examinés par le SAGE (Strategic Advisory Group of Experts on Immunization) et le WHO (Advisory Committee on Vaccine Safety) dès avril 2021, qui ont conclu à l’efficacité du vaccin Astra Zeneca pour prévenir les formes sévères de Covid19 et au fait que les effets secondaires de ce vaccin sont des événements très rares. Ils surviennent chez 1 sur 10.000 personnes. Le bénéfice de la vaccination en matière de protection contre la Covid-19 dépasse de loin les risques. Rien qu’en 2021, les vaccins contre la Covid-19 ont sauvé environ 19,8 millions de vies dans le monde. Nous déplorons bien entendu tous les cas individuels pour lesquels ces effets secondaires se manifestent, mais ceci ne remet pas en cause la vaccination contre la Covid-19 et ses bénéfices.
 

Il y a des experts, minoritaires en l’occurrence, qui disent que le fait que les vaccins anti-covid-19 soient développés en si peu de temps est problématique en soi et, par conséquent, il se peut qu’on ait des surprises sur les effets secondaires dans les années à venir. Qu’en pensez-vous ?

Si les vaccins ont été développés en peu de temps, c’est parce que nous en avions cruellement besoin pour sauver des vies, les technologies permettant leur développement sont connues depuis bien plus longtemps, de même que leur mode d’action. Cependant, les vaccins antiCovid-19, à l’instar d’autres nouveaux vaccins, ont bénéficié d’une autorisation d’utilisation d’urgence de l’OMS qui était une condition préalable pour la fourniture d’un vaccin par l’intermédiaire du Mécanisme COVAX. Celle-ci a permis également aux pays d’accélérer leur propre procédure d’homologation pour l’importation et l’administration des vaccins contre la Covid-19. Le protocole d’autorisation d’utilisation d’urgence a évalué la qualité, l’innocuité et l’efficacité des vaccins contre la Covid-19, ainsi que les plans de gestion des risques et l’adéquation des programmes, par exemple concernant les exigences de la chaîne du froid. L’évaluation est réalisée par le groupe d’évaluation des produits, composé d’experts de la réglementation du monde entier, et par un groupe consultatif technique chargé d’une évaluation risques/avantages en vue d’une recommandation indépendante concernant l’octroi et les conditions d’une autorisation d’utilisation d’urgence.

  Comment l’OMS a mené la veille sur l’évolution des vaccins et leurs effets secondaires pendant la pandémie et les campagnes de vaccination ?

La première ligne de veille après l’utilisation du vaccin chez la population est le système de pharmacovigilance en vigueur dans les pays. Ce système est déployé au Maroc par le Centre Antipoison et de Pharmacovigilance, qui est un Centre Collaborateur de l’OMS. Nous avons contribué pendant la pandémie à renforcer leurs capacités à suivre les effets secondaires des vaccins contre la Covid-19. Au niveau global, les comités mentionnés ci-dessous se réunissent régulièrement et examinent les données qui leur permettent de poursuivre la veille sur l’efficacité et la sécurité des vaccins, et émettre des recommandations sur leur utilisation.

  Y a-t-il eu un suivi épidémiologique de la campagne de vaccination au Maroc par le Bureau de l’OMS ?

Ce suivi ne se fait pas par le Bureau de l’OMS mais par le Centre Antipoison et de Pharmacovigilance. C’est son mandat.  

  Le tribunal administratif de Rabat a donné gain de cause à une victime d’effets secondaires d’Astra Zeneca contre l’Etat, condamné à verser une indemnité. A votre avis, faut-il mettre en place un mécanisme formel pour indemniser les victimes dans les années à venir pour limiter le recours aux tribunaux puisqu’il s’agit d’une procédure laborieuse qui prendra beaucoup de temps ? 

Pour ma part, il s’agit d’une affaire judiciaire sur laquelle on ne peut pas de prononcer. Dans ce domaine, je précise que ce genre de questions relève des Etats. Ce sont eux qui décident des procédures juridiques les plus adéquates selon leur contexte. 

  Il existe un mécanisme de compensation des victimes d’effets secondaires de vaccins livrés dans le cadre du programme COVAX, supervisé par l’OMS. Est-ce accessible à tout le monde, y compris aux ressortissants marocains ?  

Ces mécanismes d’indemnisation sont transférés aux Etats dans le cadre du mécanisme COVAX qui est un mécanisme d’accès aux vaccins afin que les pays puissent accéder aux stocks disponibles de façon équitable. Les procédures régulatoires qui permettent l’utilisation du vaccin dans un pays donné relèvent de la responsabilité du pays.

En effet, ce mécanisme a prévu une responsabilité et un engagement signé du pays à indemniser les patients vaccinés par les vaccins Covid-19, qui ont été sujet à des effets secondaires et qui ont demandé une compensation : “COVAX indemnification agreement”.

  Faut-il, à votre avis, une loi spécifique à la gestion des pandémies et des campagnes de vaccination, au lieu de se contenter de prendre des mesures exceptionnelles ?

Le plan de préparation et de riposte aux urgences de santé publique permet d’activer les mécanismes nécessaires. Ces mesures que vous qualifiez d’exceptionnelles sont inscrites au plan et activées selon le degré d’urgence et les nécessités de riposte.

Portrait – Maryam Bigdeli : La voix de l’OMS au Maroc
Pharmacienne de formation, Maryam Bigdeli a un doctorat en sciences de la santé publique de l’Université Libre de Bruxelles. Son expertise se situe dans les domaines du financement de la santé, de la gouvernance des systèmes de santé ainsi que de l’accès aux médicaments essentiels. Elle a commencé sa carrière avec Médecins Sans Frontières en Guinée, où elle gérait une centrale d’achat de médicaments dans la région de N’Zérékoré. Elle fit partie de l’Alliance pour la Recherche en Politiques et Systèmes de Santé où elle a géré un projet de recherche multi-pays sur l’accès aux médicaments.

Maryam Bigdeli dispose d’une longue carrière au sein de l’Organisation Mondiale de la Santé. Avant sa nomination à la tête du Bureau de l’OMS au Maroc, Mme Bigdeli a travaillé au siège de l’OMS à Genève dans le Département de la Gouvernance et du Financement des Systèmes de Santé où elle s’est occupée des aspects normatifs de la gouvernance tout en appuyant de nombreux pays de la région tels que le Maroc, la Jordanie ou le Pakistan. Avant de rejoindre le siège, elle a vécu près de dix ans en Asie du SudOuest où elle a travaillé pour l’OMS au Laos et au Cambodge.

Elle a aussi une expérience en économie de la santé et en pharmaco-économie pour l’Organisation Européenne pour la Recherche et le Traitement du Cancer ainsi qu’au Département de l’Economie de la Santé de l’Ecole de Santé Publique de l’Université Libre de Bruxelles.