En effet, « la part du commerce intrarégional dans le total des échanges internationaux des pays africains reste limitée», a-t-il souligné à l’occasion des 5èmes Journées internationales de macroéconomie et de finance qui s’achèvent ce vendredi à Dakhla précisant qu’elle ne dépasse pas 12% contre 60% en moyenne pour l’Europe et l’Asie.
De ce fait, « l’Afrique demeure largement dépendante des marchés extérieurs et, par conséquent, vulnérable aux chocs, comme nous l’avons constaté lors de la pandémie de Covid-19 ou encore avec la guerre en Ukraine », a fait remarquer Abdellatif Jouahri. La part du commerce intrarégional dans le total des échanges internationaux des pays africains reste limitée, selon le wali de BAM Pourtant, « l’intégration économique favorise la transformation structurelle, les économies d’échelle, l’intensification des échanges et le développement des chaînes de valeur, ainsi que l’émergence de marchés de taille suffisante pour attirer les investissements », a-t-il relevé à l’ouverture des travaux de cette rencontre, organisée par Bank Al-Maghrib en partenariat avec l’Université Cadi Ayyad de Marrakech et l’Université de Bâle en Suisse.
L’intégration économique en Afrique : la voie vers un avenir plus prospère
Pour le wali de la Banque centrale, il ne fait cependant aucun doute que « les pays africains sont bien conscients des retombées de l’intégration ». Il en veut pour preuve les nombreuses initiatives qui ont été lancées dans ce sens et qui ont conduit notamment à la constitution de Communautés économiques régionales.
Toutefois, si certaines sont des projets réussis, force est de constater que d’autres ne le sont pas encore « à l’instar de l’Union du Maghreb Arabe, réputée malheureusement comme l’une des régions les moins intégrées du monde ».
Plus récemment, a-t-il poursuivi, les pays africains ont lancé la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), soutenant que « cet accord constitue une lueur d’espoir au regard de ses retombées potentielles » et que les différentes évaluations réalisées sur ses impacts montrent des gains substantiels.
Malgré la volonté politique, l’intégration à plus grande échelle en Afrique fait face à de nombreux obstacles structurels que le continent est appelé à surmonter.
Pour le wali de Bank Al-Maghrib, le premier est sans doute l’énorme déficit en matière de capital humain. En effet, selon les données de la Banque mondiale, 2,9 millions d’enfants de moins de 5 ans et 200 mille femmes enceintes décèdent chaque année.
A noter également que, sur le plan de l’éducation, 50 millions d’enfants ne sont pas scolarisés, et ceux qui le sont n’apprennent pas suffisamment.
Le constat sur le plan économique est tout aussi édifiant : «Les structures productives restent fragiles dominées par l’informel qui représente plus de 80% de l’emploi. La croissance économique est volatile et largement insuffisante pour offrir des opportunités d’emploi décent à la jeunesse et un niveau de vie convenable à la population », a, en outre, déploré Abdellatif Jouahri rappelant, par ailleurs, que le Bureau international du travail estime que 26,1% des jeunes africains de 15 à 24 ans ne sont pas en emploi et ne suivent ni études ni formation.
C’est dire que l’Afrique a besoin de valoriser son capital humain pour tirer profit de son dividende démographique, de réformer en profondeur ses économies pour mieux fructifier ses richesses et de combler son énorme déficit en infrastructures.
Mais pour cela, il faut nécessairement « des ressources conséquentes dans un contexte caractérisé par l’amenuisement des marges budgétaires et le durcissement des conditions de financement », a-t-il expliqué. Citant des chiffres de la Banque africaine de développement (BAD), le wali a rapporté que les besoins non satisfaits de financement pour l’infrastructure se situent entre 68 milliards et 108 milliards de dollars par an.
Mais il n’ya pas que cela : «Outre les ressources financières, la réussite de la mise en œuvre d’un tel agenda de réformes nécessite d’abord un environnement de stabilité politique et de sécurité, qui fait malheureusement défaut aujourd’hui dans certaines régions de notre continent », a-t-il estimé.
Comme pour attirer l’attention des participants à ce forum annuel de réflexion et de débat sur des problématiques de recherche, académique certes, le wali a insisté sur le fait que « l’intégration économique n’est pas toujours garante de prospérité généralisée. Il n’y a qu’à considérer l’essor de la mondialisation, le plus important mouvement d’intégration commerciale de l’histoire, pour s’en rendre compte ».
Pour d’une intégration économique inclusive
Pour que l’intégration économique de l’Afrique mène à la prospérité souhaitée, a-t-il insisté, « il faudrait veiller à ce qu’elle soit inclusive, mutuellement bénéfique, et surtout qu’elle ne soit pas au détriment des pays et des populations les plus vulnérables ». Et d’assurer qu’en dépit du contexte international difficile, l’Afrique est appelée à émerger et à trouver sa place au sein de l’échiquier mondial.
D’après lui, les simulations effectuées par le Fonds monétaire international (FMI) indiquent que la mise en place de la ZLECAf, si elle est accompagnée des réformes facilitant les échanges, pourrait augmenter la médiane des échanges commerciaux de l’Afrique avec le reste du monde de 15% et avec les pays africains de 53%, ce qui contribuerait à une hausse du PIB médian par habitant de plus de 10%. Selon les mêmes estimations, elle permettrait également de sortir plus de 30 millions de personnes de l’extrême pauvreté.
Ouvertes mercredi 22 mai, les 5èmes Journées internationales de macroéconomie et de finance sont organisées en partenariat avec le Conseil régional de Dakhla-Oued Eddahab.
Alain Bouithy