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Inflation en baisse et taux de croissance limité

Inflation en baisse et taux de croissance limité
Les incertitudes ont cependant la vie dure
Bonne et mauvaise nouvelle pour les Marocains : le taux d’inflation reculerait mais la croissance de l’économie nationale serait limitée. C’est ce qui ressort de la première réunion de l’année 2024 du conseil de Bank Al-Maghrib tenu mardi. Selon un communiqué de la banque, l’inflation reculerait à 2,2% en 2024 et le taux de croissance prévu serait de 2,1%.
 
Projections
 
La Banque centrale précise que si l’inflation reculerait à 2,2% en 2024, elle se situerait à 2,4% en 2025. La composante sous-jacente de cette inflation devrait osciller autour de 2,3% cette année et en 2025.
Le communiqué ajoute qu’« après le pic de 10,1% atteint en février 2023, l’inflation s’est inscrite en baisse, revenant à 3,4% en décembre pour terminer l’année 2023 avec une moyenne de 6,1%, après 6,6% en 2022 », ajoutant que « la composante sous-jacente a suivi une trajectoire similaire, passant de 6,6% en 2022 à 5,6% en 2023 ».

Aussi, le Conseil a pris note qu’après deux trimestres successifs de baisse, les anticipations d’inflation à moyen terme, telles qu’elles ressortent de l’enquête trimestrielle de BAM auprès des experts du secteur financier, ont connu une quasi-stabilité au premier trimestre de 2024.

Concernant le taux de croissance, BAM prévoit 2,1% en 2024 et 4,3% en 2025. «La croissance économique aurait été proche de 3% en 2023 et devrait se limiter à 2,1% en 2024 avant de s’accélérer à 4,3% en 2025», indique BAM. Et de préciser que le démarrage de la campagne agricole a été marqué par des conditions climatiques défavorables, avec des précipitations faibles et inégalement réparties sur les plans territorial et temporel ayant affecté la superficie emblavée des céréales qui se serait située autour de 2,5 millions d’hectares, contre près de 3,7 millions une année auparavant, fait remarquer la même source.

Et de poursuivre : «Ainsi, selon les projections de Bank Al-Maghrib, la production céréalière avoisinerait 25 millions de quintaux contre 55,1 millions une année auparavant. Dans ce contexte, la valeur ajoutée agricole se contracterait de 6,4% en 2024 avant de rebondir de 12,8% en 2025, sous l’hypothèse d’un retour à une récolte céréalière moyenne de 55 millions de quintaux ».

Quant aux activités non agricoles, leur rythme de progression s’améliorerait de 2,6% en 2023 à 3% en 2024 puis à 3,5% en 2025, reflétant en particulier la dynamique attendue de l’investissement en lien avec les différents chantiers engagés et prévus.

Sur le plan de la transmission de la politique monétaire, les taux débiteurs se sont stabilisés au dernier trimestre de 2023, l’accroissement total depuis le début du resserrement monétaire se maintenant ainsi à 112 points de base (pbs) contre 150 pbs pour le taux directeur.

La hausse des taux a concerné davantage les entreprises que les particuliers et a été moins importante pour les très petites, petites et moyennes entreprises (TPME) que pour les grandes entreprises.
 
Incertitude
 
Pour Mohammed Krekeb, un économiste, il faut prendre ces chiffres avec des pincettes. Selon lui, les institutions officielles avancent parfois des statistiques irréelles et incertaines. Notamment celles concernant certains domaines sociaux comme le chômage, la pauvreté et l’inflation, et ce « à cause de méthodes de calcul peu crédibles au niveau scientifique », souligne-t-il.

S’agissant de l’inflation, il a tenu à préciser qu’on doit identifier de quoi on parle puisqu’il y a l’inflation immobilière, alimentaire, et celle concernant l’électroménager et les biens de consommation. « Car si l’inflation immobilière reste stable tout en gardant un niveau élevé, celle relative à l’alimentation a certes baissé mais pas grâce au taux d’intérêt ou à la politique monétaire qui a augmenté le taux d’intérêt pour réduire la consommation générale sans que cela, pour autant,  donne des effets positifs.

En effet, la baisse est due aux restrictions sur les marchandises marocaines de la part de la Mauritanie et de l’UE. Du coup, il y a eu une abondance de l’offre   provoquant une baisse des prix », nous a-t-il expliqué. Et d’ajouter : « C’est pourquoi je me demande comment BAM pourrait calculer une baisse des prix pour l’année prochaine. Idem pour la production agricole alors qu’on est dans une année de sécheresse et personne ne sait comment cela va passer. D’autant qu’une grande partie des produits agricoles dépendent du marché international ».

Sur un autre registre, notre interlocuteur se demande également pourquoi les dirigeants de BAM se sont focalisés sur la balance de paiement (tourisme, transferts des MRE, commerce intérieur) et ont évité d’évoquer la dette intérieure « alors que le Maroc est sérieusement endetté et cela contraint l’Etat à contracter davantage de crédits extérieurs pour rembourser la dette, ce qui entraîne une baisse des dépenses de l’Etat au niveau du fonctionnement ou de l’investissement. Et cela va poser des problème l’année prochaine ». Et de poursuivre : « Les prévisions restent également difficiles dans le cas des transferts des MRE dont personne ne sait comment ils vont évoluer. Idem pour le secteur du tourisme dont l’évolution du nombre des touristes internationaux depuis les années 2002/2003 est passée seulement de 2,5 millions à 5 millions alors que les statistiques officielles indiquent 14 millions de touristes étrangers. En effet, l’offre touristique marocaine demeure peu attractive et limitée sur certains points (prise en charge médicale, tourisme balnéaire…). D’autant que ces touristes consomment très peu et profitent des prix dérisoires grâce à des agences de voyages. Bref, il ne faut pas compter sur une progression du nombre des touristes étrangers ni sur le commerce international en déficit important. En conclusion, on peut dire que l’ensemble de ces facteurs laissent penser que les prévisions de croissance restent incertaines au Maroc. Idem pour l’inflation ».

Hassan Bentaleb