
La famille Zouaoui est l’une des grandes familles historiques de Salé. Elle aurait participé à la célèbre bataille de Oued Al Makhazin en 1578. La famille conserve encore un dahir datant du XVIe siècle, attestant de la nomination d’Ahmed Ben Omar Zouaoui comme Gouverneur de Salé par le Sultan Ahmed al Mansur Dahbi. Depuis au moins 400 ans, les Zouaoui occupent la charge de mouaqit de la Grande Mosquée de Salé. En plus de ce sacerdoce, les Zouaoui étaient traditionnellement aussi moqaddem-s de la zaouia Tijania à Salé.

Cette grande demeure des Zouaoui fait partie de ces dernières vastes demeures bâties à Salé au siècle dernier à l’instar de Dar Hajj Mohamed Benomar à Jarda ou de la maison de Boubker Ben Hajj Ali Aouad dans le quartier Qsatla dans laquelle la princesse Lalla Aicha prononça son célèbre discours en 1947. Contrairement à ces deux grandes demeures, Benomar et Aouad, dont les cours centrales « Wast ad-Dar » ont remplacé les arcades et les colonnes du patio au profit de panneaux de bois en « zwaq » qui ceignent le pourtour supérieur du patio, Dar Zouaoui a conservé les anciennes caractéristiques originelles de l’architecture domestique de Salé et notamment ses arcades et ses péristyles, les nbeh-s.
Derrière ses modestes portes et des murs extérieurs blanchis à la chaux se cache un intérieur d’une richesse insoupçonnée. Le patio carré agit comme un point focal ou un centre autour duquel les façades sont conçues symétriquement, créant une harmonie visuelle, une organisation géométrique ainsi qu’une luminosité optimale.
La particularité de Dar Zouaoui réside dans ses deux patios principaux, résultat d’une construction en deux temps. L’acquisition tardive d’un terrain adjacent permit d’ajouter un second patio, conçu comme un jardin persan « Charbagh », divisé en quatre parties rappelant le Patio des Lions de l’Alhambra. Les sols sont recouverts de marbre gris clair ou de zelliges, tandis que les patios sont entourés d’arcades et colonnades en pierre.
Les arcs en pierre taillée présentent tous des muqarnas, tandis que les corbeilles des chapiteaux mérinides ou nasrides sont décorées de feuilles d’acanthe stylisées. Les grandes portes sont surplombées de claustras en stucs ajourés typiques de l’architecture mérinide et andalouse. Les couleurs des fenêtres en verre polychrome (zaj la’raqi) dialoguent avec celles des zelliges dans un décor chatoyant. Dans les chambres latérales d’une hauteur sous plafond remarquable, on trouve à chaque extrémité de la pièce de grandes alcôves délimitées par de grands arcs en muqarnas d’où pendent de riches tentures de brocart.
Contrairement aux autres grandes demeures de Salé construites sur deux étages symétriques, Dar Zouaoui ne possède pas de « derbouz » et donne l’impression d’être entièrement construite en rez-dechaussée. La partie supérieure de ses façades intérieures est ceinte d’une frise en « pierre de Salé », la calcarénite, finement sculptée.
Le grand salon est une véritable œuvre d’art. Partout où se pose le regard, il y a une profusion de décors complexes et élégants. Nulle surface est vide. Les murs sont couverts de zelliges et de stucs finement sculptés et de calligraphies colorées. Le plafond en bois peint (zwaq), très haut et creusé de trois petites coupoles, abrite un lustre à vases caliciformes festonnés que l’on ne retrouve plus aujourd’hui et qui rappelle les lustres de cristal de Baccarat et de Bohême des palais ottomans. De chaque côté du salon se trouvent de grandes alcôves séparées par des arcades ornées de tentures somptueuses en brocart. De part et d’autre de la niche centrale en muqarnas en bas-reliefs trônent deux portraits encadrés : celui de Hajj Mohammed Ben Mekki Zouaoui à gauche et à droite celui du Cadi Driss Ben Abdallah Benkhadra, beau-père de Abdallah Zouaoui et père de son épouse Halima Benkhadra.
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