
Le rapport met en évidence l’énorme consommation énergétique et hydrique nécessaire à la formation et à l’utilisation de ces modèles, une consommation souvent peu documentée et difficile à attribuer précisément. Il souligne aussi les risques sociétaux majeurs que représente l’IA générative : production de contenus erronés ou nuisibles, atteintes à la vie privée, amplification des biais, menaces sur la cybersécurité et exacerbation des inégalités. Face à ces défis, le GAO propose une série de recommandations pour renforcer la transparence, encourager une innovation plus sobre, promouvoir une gouvernance responsable de l’IA, établir des standards techniques, et développer une vigilance accrue sur les impacts sociaux.
En transposant ces recommandations au contexte marocain, il est possible de dresser un état des lieux lucide et de proposer des axes d’action stratégiques pour garantir un développement de l’IA générative conforme aux objectifs de souveraineté numérique, de durabilité et d’inclusion sociale que s’est fixé notre pays.
Aujourd’hui, le Maroc dispose d’atouts certains : une stratégie nationale pour l’IA en cours de déploiement, des infrastructures numériques en expansion, et un écosystème universitaire et entrepreneurial dynamique. Toutefois, plusieurs domaines nécessitent des efforts complémentaires. La collecte et la publication de données environnementales liées à l’IA, recommandées par le GAO, restent absentes. Ni les opérateurs de cloud, ni les développeurs IA locaux ne publient actuellement d’informations sur la consommation énergétique ou hydrique de leurs infrastructures. Il est urgent que le Ministère de la Transition Énergétique et la CNDP imposent une obligation de transparence environnementale spécifique aux infrastructures IA.
Sur le plan de l’innovation technologique, quelques initiatives pour réduire l’empreinte énergétique existent, portées notamment par des universités comme l’UM6P ou l’ENSIAS, mais elles restent marginales et sans financement structuré. Le CNRST et le Ministère de l’Enseignement Supérieur devraient donc financer et promouvoir activement des projets de « IA verte », en encourageant le développement de modèles sobres et optimisés.
Concernant la gestion des risques de l’IA, le Maroc dispose d’initiatives embryonnaires mais fragmentées. La Stratégie nationale IA évoque des principes éthiques, mais l’adoption d’un cadre méthodologique inspiré du NIST AI Risk Management Framework ou du GAO AI Accountability Framework reste à formaliser. L’Agence de Développement du Digital (ADD) et la CNDP doivent impérativement structurer cette démarche pour encadrer l’innovation tout en garantissant sécurité, transparence et responsabilité.
La question des normes et standards pour l’IA responsable est également cruciale. À ce jour, aucune norme marocaine spécifique à l’IA n’existe. L’IMANOR doit piloter la création de normes nationales en s’appuyant sur les standards internationaux émergents, afin de donner aux acteurs marocains un cadre clair et reconnu.
Enfin, la vigilance sur les impacts humains de l’IA générative, notamment en termes d’emplois, de formation et d’inclusion, reste insuffisamment anticipée. Le Ministère du Travail doit mener une évaluation prospective des effets de l’automatisation par IA sur les différents secteurs économiques, tandis que le Ministère de l’Éducation Nationale doit intégrer l’éducation critique à l’IA dans les programmes scolaires, pour préparer la jeunesse à devenir des citoyens éclairés et responsables dans une société profondément numérisée.


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