
L’ambition portée par cette ville dépasse la simple logique d’aménagement du territoire. Elle incarne un projet civilisationnel conjuguant souveraineté, prospérité partagée et insertion stratégique dans les grandes dynamiques mondiales notamment celles liées à la transition énergétique, à la sécurité alimentaire, à la connectivité logistique et au tourisme responsable. L’analyse de cette trajectoire permet d’illustrer, chiffres à l’appui, la montée en puissance d’un modèle territorial intégré, résilient et tourné vers l’avenir.
Le site bénéficie également d’un environnement naturel d’exception. La lagune de Dakhla, classée zone Ramsar, abrite une biodiversité remarquable : flamants roses, sternes royales, dauphins, et phoques moines s’y côtoient. Le Parc National couvre plus de 350 km² et constitue un atout pour l’écotourisme, un segment en pleine expansion dans le tourisme mondial, évalué à plus de 181 milliards de dollars en 2023 selon l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT).
a) Zone Économique Intégrée Dakhla Atlantic Free Zone
Avec 3 000 hectares dédiés à l’industrie, à la logistique et à l’agro-business, cette zone vise à faire de Dakhla un hub industriel régional. Des incitations fiscales attractives et une connectivité renforcée visent à capter les flux d’investissements en provenance d’Europe, du Golfe et d’Afrique subsaharienne. À terme, plus de 15 000 emplois directs sont attendus. La Banque Africaine de Développement (BAD) et d’autres institutions multilatérales suivent de près cette initiative qui pourrait devenir une locomotive du commerce Sud-Sud.
b) Nouveau Port Atlantique de Dakhla
Ce mégaprojet d’un coût de 12,5 milliards de dirhams ambitionne de doter la ville d’un port en eaux profondes, avec une capacité annuelle de 2,5 millions de tonnes. Outre les produits halieutiques, ce port facilitera l’exportation de produits agricoles et industriels. Il renforcera aussi la position du Maroc dans le corridor logistique transsaharien, en connectant Tanger Med au Sahel.
c) Projet Touristique « Dakhla Attitude »
Avec plus de 1 000 unités d’hébergement prévues et un positionnement haut de gamme axé sur le sport et la nature, Dakhla se positionne comme une destination de niche, particulièrement pour les amateurs de kitesurf, windsurf et yoga. En 2023, plus de 15 000 touristes sportifs y ont séjourné, générant plus de 450 millions de dirhams de recettes directes. L’objectif est de dépasser les 150 000 visiteurs d’ici 2030.
d) Énergies Renouvelables : Solaire et Éolien
Grâce à un ensoleillement annuel dépassant 3 000 heures et à des vents réguliers, Dakhla se positionne comme un futur pôle énergétique vert. Une centrale solaire de 100 MW et un parc éolien de 200 MW sont en cours de développement, en partenariat avec MASEN. À terme, ces infrastructures contribueront à l’objectif national de 52 % d’énergie propre dans le mix énergétique d’ici 2030. Un projet pilote de production d’hydrogène vert à partir de l’énergie éolienne est également à l’étude avec des acteurs européens.
e) Agriculture et Dessalement : Vers une Souveraineté Alimentaire Verte
Le méga-projet agricole « Marchica Agri » s’appuie sur une station de dessalement d’une capacité de 30 000 m³/jour, extensible à 100 000. Il permettra d’irriguer 5 000 hectares de terres agricoles dédiées à la culture de produits à forte valeur ajoutée (tomates cerises, melons, herbes aromatiques). L’objectif est double : répondre aux besoins nationaux et créer une offre exportable vers l’Europe et le Moyen-Orient. Le secteur pourrait créer plus de 4 000 emplois directs.
f) Connectivité Aérienne et Routière
L’aéroport de Dakhla, entièrement modernisé, peut accueillir désormais un million de passagers par an. Des lignes régulières relient la ville à Casablanca, Marrakech, Las Palmas, et Paris, avec des discussions en cours pour des liaisons vers Dakar et Lisbonne. Par ailleurs, la construction du tronçon autoroutier Dakhla-Tiznit (1 055 km) renforce le maillage national et permettra de fluidifier les échanges commerciaux et touristiques.
En parallèle, un écosystème d’enseignement supérieur est en construction, incluant des instituts de formation professionnelle en logistique, énergies renouvelables, santé et tourisme. Ce tissu éducatif vise à répondre aux besoins en compétences et à favoriser l’ancrage local des talents.
Conclusion : Dakhla, Modèle Territorial de Croissance Inclusive et Verte
L’expérience de Dakhla démontre que les territoires périphériques peuvent devenir des centres de gravité économique et géopolitique s’ils sont intégrés dans une stratégie nationale ambitieuse, fondée sur la durabilité, l’innovation et l’ouverture. En conjuguant agriculture intelligente, tourisme éthique, industrie propre, pêche durable et diplomatie proactive, Dakhla trace la voie d’un modèle africain de développement territorial du XXIe siècle.
L’avenir de Dakhla dépendra de sa capacité à poursuivre les réformes, à renforcer l’inclusion sociale, à protéger ses écosystèmes et à attirer les capitaux patients. Mais les jalons sont déjà posés : Dakhla est devenue bien plus qu’une ville du Sud, elle est désormais un carrefour de promesses entre trois continents.
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