Sur les réseaux sociaux, les témoignages affluent, confirmant l’ampleur du problème. Qu’ils proviennent des grandes métropoles ou des zones rurales, ils décrivent tous une même réalité : des malades, livrés à eux-mêmes, contraints d’entamer de véritables périples dans l’espoir de trouver leur traitement vital, mais toujours en vain. Ni les autorités sanitaires ni le fabricant, Pfizer, ne se sont exprimés pour fournir des explications ou des solutions concrètes.
La détresse des malades, amplifiée par l’indifférence apparente des acteurs concernés et par l’absence d’alternatives, témoigne d’une faille criante dans la gestion de l’approvisionnement pharmaceutique. Le cadre juridique en place, notamment la loi 17.04, est pourtant sans équivoque. Cette législation impose au gouvernement de garantir un stock stratégique suffisant pour couvrir les besoins du marché national pendant au moins trois mois. Mais les faits sont implacables : l’absence de l’Aldactone, comme celle d’autres médicaments essentiels tels que le Tambocor 100 mg, montre que ces obligations restent théoriques, exposant les patients à une aggravation irréversible de leur état. Ce qui ne saurait être justifié par des arguments techniques ou conjoncturels.
Obstacles internationaux et lacunes locales
Selon plusieurs spécialistes, les raisons de cette crise sont multiples. A l’échelle internationale, les grandes multinationales du secteur pharmaceutique orientent leurs productions et leurs livraisons en fonction des volumes les plus lucratifs, laissant des marchés comme celui du Maroc en marge de leurs priorités. A cela s’ajoute une faiblesse de la production locale, encore incapable de pallier les ruptures dans l’importation de médicaments. Cette combinaison d’obstacles internationaux et de lacunes nationales place les patients marocains dans une position de vulnérabilité accrue, aggravée par une demande croissante liée à la prévalence des maladies chroniques.
Cette crise soulève des interrogations lourdes de sens : comment un pays peut-il garantir la santé de ses citoyens si l’accès aux médicaments de base devient un luxe? Les mesures prises jusqu’à présent semblent dérisoires face à l’ampleur des besoins. Le gouvernement, qui se targue régulièrement de ses petites actions en matière de couverture médicale, est aujourd’hui sommé de répondre à une urgence qui touche aux fondements mêmes du droit à la santé.
Il est désormais urgent de repenser les politiques pharmaceutiques du pays. L’augmentation des capacités de production nationale, longtemps reléguée à l’arrière-plan des priorités, doit devenir un impératif stratégique. Parallèlement, une diversification des sources d’importation s’impose, afin de réduire les risques liés à une concentration excessive des approvisionnements sur quelques fabricants. Mais au-delà des réponses techniques, c’est une réforme en profondeur du système de surveillance et de régulation qui est nécessaire. L’absence prolongée de l’Aldactone montre que les mécanismes actuels sont insuffisants pour anticiper et prévenir de telles crises.
Face à cette situation, l’inaction ne peut plus être une option. La santé des citoyens ne saurait rester tributaire des aléas d’un marché globalisé ou des dysfonctionnements locaux. Le silence des responsables, qu’il s’agisse des autorités sanitaires ou des fabricants, est non seulement intenable, mais aussi dangereux. Les patients marocains, qui luttent déjà contre les affres de la maladie, méritent bien plus qu’une résignation institutionnelle. Ils méritent des réponses, des solutions et, surtout, un système de santé qui place leur bien-être au cœur de ses priorités.
Enfin, il faut dire qu’il ne s’agit pas là d’une question de santé publique seulement, mais aussi de confiance, d’éthique et de justice sociale. Le Maroc ne peut se permettre de tourner le dos à ses malades. Des solutions existent et il est impératif de les mettre en œuvre sans tarder.
Mehdi Ouassat
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