Fraîchement nommé à la tête du ministère de la Santé, Amine Tahraoui a trouvé un terrain d’entente, ce dimanche, avec les syndicats du secteur de la Santé.
En tête de liste figure le maintien du statut de fonctionnaire pour les professionnels de la Santé, tout en assurant la centralisation des postes budgétaires et des rémunérations. En clair, le paiement des salaires des professionnels devrait se faire à partir du budget général de l’État, or, le PLF 2025 prévoit, dans son article 23, le transfert des employés des services décentralisés vers les groupements sanitaires territoriaux (GST), avec un mode de gestion différent des postes budgétaires. Après un long bras de fer, les syndicats ont fini par avoir gain de cause, comme en témoigne le communiqué publié, dimanche par la Coordination, à l’issue de sa réunion avec le nouveau ministre de tutelle. A la tête du ministère depuis moins d’un mois, Amine Tahraoui s’est engagé à maintenir le statut de fonctionnaire public et à mettre en œuvre incessamment les dispositions de l’accord du 23 juillet. «Il s’agit d’un acquis fondamental pour le corps médical, car il garantit la pérennité du système de fonctionnariat, sans aucune ambiguïté», nous indique Mustapha Chennaoui, Secrétaire général du Syndicat national de la Santé publique relevant de la Confédération Démocratique du Travail (CDT).
Dans cette perspective, le département de la Santé s’est plié en quatre, apprend-on de même source, pour trouver des solutions juridiques garantissant la centralité des postes budgétaires et des salaires, sans pour autant porter atteinte à la nouvelle architecture de la réforme.
Selon le communiqué de la Coordination, ce point entamera, ce mardi 12 novembre, le circuit législatif au sein de la Chambre des Représentants, ce que les représentants du secteur qualifient de « signe positif vers la mise en œuvre effective du principal point de l’accord du 23 juillet». Mustapha Chennaoui précise, par ailleurs, que le dialogue avec le nouveau ministre se déroule dans de bonnes conditions, précisant qu’au moment où le ministre sortant, Ait Taleb, dirigeait ce maroquin, «il y avait des lenteurs administratives, principalement dues aux va-et-vient entre le ministère de la Santé et celui des Finances sur les modes d’application de certaines mesures ou revendications».
Le packaging de l’accord convenu entre la tutelle et les syndicats prévoit également des avancées majeures en matière de rémunération et de statut. Le gouvernement s’est engagé à lancer une étude sur la création d’un nouveau grade pour toutes les catégories des professionnels de la Santé, en lien avec la réforme des systèmes de retraite. Il est également prévu d’organiser des concours professionnels internes en fonction des besoins annuels du secteur en compétences dans le domaine de la Santé, dans le cadre des statuts des GST. Il s’agit également d’adopter la formule optimale de calcul de la valeur des indemnités de garde et de permanence au profit des professionnels de Santé.
L’accord prévoit également des indemnités spéciales pour l’engagement au sein des programmes de santé, y compris la médecine de famille, la médecine des addictions, ou encore la médecine du travail. Le ministère devra également mettre les bouchées doubles pour promulguer le décret relatif aux indemnités dédiées aux professionnels de la Santé suite aux tâches relatives à l’encadrement et à la formation. D’autres mesures qualifiées de «game changer» pour le secteur devraient passer par le circuit législatif, de sorte à débloquer la très attendue réforme de la Santé.
- Des avancées majeures ont été atteintes au niveau du dialogue sectoriel sur la Santé. Quel est le grand challenge à relever dans la réforme, aujourd’hui en dernière ligne droite ?
- Comment le Parlement accompagne-t-il cette réforme ?
- Les médecins étrangers ont-ils toujours leur place dans cette nouvelle réforme ?
Le gouvernement, rappelons-le, vise à atteindre 90.000 médecins d’ici 2025, afin d’aligner le Maroc sur les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui recommande le seuil de 24 professionnels de Santé pour 10.000 habitants. Cette année, au titre de la Loi des Finances de 2024, l’Exécutif a créé 5.500 nouveaux postes budgétaires dans la Santé publique. Cela dit, 16.500 postes budgétaires ont été créés dans le secteur depuis l’arrivée du gouvernement actuel. Un chiffre qui demeure insuffisant pour atteindre les standards internationaux. Le Royaume place ses espoirs dans la formation bien que la capacité des Facultés de médecine demeure limitée. Actuellement, celles-ci forment 1400 médecins par an alors qu’il en faut, en principe, 3000 chaque année. En parallèle avec l’effort de formation, le gouvernement a ouvert la porte aux compétences étrangères. Les résultats se font d’ores et déjà sentir. Près de 453 médecins étrangers exercent actuellement dans le secteur privé, selon les chiffres dévoilés récemment par le ministre de la Santé.
Au moment où l’émigration des cadres marocains vers l’Europe et l’Amérique du Nord inquiète de plus en plus, le Chef du gouvernement a reconnu l’urgence de mettre fin à l’hémorragie. Depuis la tribune de l’hémicycle, Akhannouch a rappelé qu’il faut transmettre ce message aux partenaires européens. Il s’est plaint du fait que certains pays gardent les jeunes étudiants pour les intégrer dans leurs hôpitaux au détriment des pays d’origine, dont le Maroc. “Certains pays ont un quota, dès que quelqu’un arrive chez eux, ils le prennent”, a-t-il déploré, ajoutant qu’il est urgent de soulever cela avec les partenaires européens. “Je n’ai pas manqué de le faire savoir à nos amis allemands”, a-t-il rappelé, faisant allusion à sa récente visite à Berlin où il a rencontré son homologue allemand Olaf Scholz
Pour rappel, l’exode des médecins devient d’autant plus préoccupant que les chiffres sont alarmants. Près de 700 quittent le Royaume chaque année pour s’installer ailleurs, là où les conditions de travail et les salaires sont meilleurs. Selon une étude publiée dans l’“European Journal of Public Health”, le 20 octobre 2021, 70% des futurs médecins ont fait part de leur volonté de quitter leur pays après la fin de leurs études.
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