La candidate démocrate de 60 ans, première procureure générale de Californie, première vice-présidente, femme noire et d’origine asiatique, coche toutes les cases du rêve américain
La vice-présidente a lâché récemment que selon elle le pays était « parfaitement prêt » à élire une femme, mais en ajoutant immédiatement: « Ce qui intéresse la plupart des gens, c’est de savoir si vous pouvez faire le travail et si vous avez un plan pour eux ».
« Elle va laisser sa campagne et ses partisans parler du fait qu’elle pourrait entrer dans l’histoire (…) mais elle n’a pas besoin d’en faire un élément central de sa campagne. Cela joue un rôle, mais sans être explicite », explique Kelly Dittmar, professeure de sciences politiques à l’université Rutgers.
Entrée en lice le 21 juillet, après le retrait sidérant du président Joe Biden, la candidate démocrate de 60 ans, première procureure générale de Californie, première vice-présidente, femme noire et d’origine asiatique, coche toutes les cases du rêve américain.
Mais quand elle l’évoque, c’est plutôt au travers de sa mère Shyamala Gopalan, immigrée indienne, chercheuse spécialiste du cancer du sein, investie dans la lutte pour les droits civiques.
« J’étais l’aînée, je voyais comment le monde pouvait parfois la traiter. Mais ma mère ne perdait jamais son calme », avait raconté Kamala Harris lors d’une convention euphorique du Parti démocrate en août.
Pas plus que la candidate ne perd le sien, face aux insultes de son rival.
De son père jamaïcain, la vice-présidente ne parle quasiment jamais. Selon la presse, elle n’a plus guère de liens avec cet ancien économiste de gauche, que Donald Trump se fait un plaisir de dépeindre, comme sa fille, en « marxiste ».
Qu’il s’agisse de son histoire personnelle ou du reste, la candidate démocrate, surnommée « Momala » dans sa famille recomposée, évite les aspérités.
Les républicains se font un plaisir de la qualifier de « girouette », au sortir d’interviews télévisées lors desquelles elle fait des réponses parfois franchement alambiquées.
Alors qu’aucun des deux candidats n’a réussi à creuser un écart qui sorte de la marge d’erreur, Kamala Harris parie que l’Amérique a soif de sérénité et de légèreté, loin des discours de plus en plus sombres de son rival.
Quand elle durcit le ton, c’est de manière réfléchie. Si elle vient de qualifier son rival de « fasciste », cela s’inscrit dans une montée en puissance calculée, visant à la dépeindre, en fin de campagne, comme la garante de la démocratie américaine.
Elle laisse son jovial colistier Tim Walz lancer des attaques plus vertes – il vient de qualifier le milliardaire Elon Musk, fervent soutien de Donald Trump, de « merdeux ».
Pour l’éclat, elle se repose sur une ribambelle de stars – Michelle et Barack Obama, Bruce Springsteen et Beyoncé.
Forte de contributions financières plus abondantes que celles de Donald Trump, une véritable armée démocrate multiplie les distributions de tracts, les coups de fil, les publicités télévisées et les offensives sur les réseaux sociaux dans les sept Etats décisifs.
Kamala Harris a recruté la républicaine Liz Cheney, opposante à Donald Trump, et s’est invitée sur la chaîne préférée des conservateurs, Fox News, dans l’espoir de gagner quelques suffrages de républicains modérés.
Au centre toute: elle ne promet pas de bouleversements économiques mais des coups de pouce aux familles et aux jeunes ménages. En politique étrangère, elle promet de soutenir l’Otan, l’Ukraine et Israël, tout en oeuvrant à un cessez-le-feu à Gaza.
Sur certaines questions épineuses, l’immigration notamment, la candidate démocrate a tourné le dos à ses positions progressistes passées, sans états d’âme, sans réelles explications non plus.
Mais Kamala Harris n’a jamais varié sur sa défense, pour le coup passionnée, du droit à l’avortement.
Pendant le débat du 10 septembre avec son rival républicain, elle avait dénoncé les interdictions de l’IVG décidées dans de nombreux Etats conservateurs.
« Vous voulez parler de ce que les gens veulent? », avait-elle lancé à un Donald Trump renfrogné, avant d’évoquer le cas d’une femme faisant une fausse couche, et que des médecins ont refusé de soigner aux urgences de peur d’être accusés de pratiquer un avortement. « Elle se retrouve à saigner dans sa voiture, sur le parking. Ce n’est pas ça qu’elle voulait. »
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