Du 28 au 30 octobre, se déroule la visite officielle du président français Emmanuel Macron au Maroc, durant laquelle une série d’accords ont été signés entre les deux partenaires pour un total de 10 milliards d’euros. Ces accords ouvrent une nouvelle ère dans les relations des deux pays.
Au Parlement, il a prononcé un discours aux allures d’une lettre d’amour, qu’il a déclamé devant les parlementaires lors d’une séance solennelle. Venu effacer le souvenir amer de la brouille diplomatique, le locataire de l’Elysée a dit tout le bien qu’il pense du Royaume, avec lequel il veut écrire un nouveau livre pour une nouvelle ère d’entente cordiale.
Durant sa longue allocution ponctuée d’applaudissements, le président a donné un avant-goût de la nouvelle Histoire que les deux pays s’apprêtent à écrire ensemble. Comme prévu, il a réitéré devant les élus de la Nation le soutien de son pays à la marocanité du Sahara, une décision que Paris défendra désormais vigoureusement dans les instances internationales.
Cette position qui n’est hostile à personne, a-t-il pris soin de préciser en s’adressant implicitement à l’Algérie qui a fulminé contre son virage pro-marocain. “Aujourd’hui, on va pouvoir faire valoir davantage la position du Maroc sur le Sahara dans les Nations Unies”, se félicite M’jid El Guerrab, ancien député du parti présidentiel, dans une déclaration à « L’Opinion ».
«Nos opérateurs et nos entreprises accompagneront le développement de ces territoires au travers d’investissements, d’initiatives durables et solidaires au bénéfice des populations locales», a fait savoir Emmanuel Macron, qui n’a pas manqué d’évoquer l’immigration, l’un des marronniers les plus épineux.
Là, il s’est montré modéré en appelant de ses vœux à une «coopération naturelle et fluide» contre «l’immigration illégale» pour avoir de meilleurs résultats. Cela renvoie à la question de la mobilité réciproque que le président veut promouvoir, surtout en ce qui concerne “les talents”.
Dès qu’on parle d’immigration, on ne peut que penser au ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui en fait la priorité de son mandat à Place Beauvau. Issu de la droite dure, très sensible aux sujets régaliens, il veut à tout prix accélérer l’exécution des OQTF (obligation de quitter le territoire nationale). Un thème central dans les entretiens que ce dernier aura avec son homologue marocain. Pour lui, le deal est clair : plus de visas en échange des fameux laissez-passer consulaires indispensables au retour des migrants refoulés.
Après avoir désespéré complètement d’un rapprochement avec l’Algérie, Emmanuel Macron a centré désormais sa politique maghrébine sur le Maroc, auquel il propose un nouveau «cadre stratégique» bilatéral en 2025, qui sera à l’ordre du jour de la prochaine visite d’Etat de SM le Roi à Paris.
Cet accord vise à permettre aux deux pays de mieux répondre à l’ensemble des défis auxquels ils sont confrontés, en mobilisant tous les secteurs pertinents de la coopération bilatérale, régionale et internationale.
Ensuite, les deux chefs d’État ont présidé, lundi soir, au Palais des Hôtes Royaux, la cérémonie de signature de plusieurs accords entre le Royaume du Maroc et la République française. Le premier est un Protocole d’Accord relatif à la fourniture de rames à grande vitesse et leurs éléments de soutien.
Signé par le Directeur général de l’Office National des Chemins de Fer (ONCF), Mohamed Rabie Khlie, et le Directeur général d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge, cet accord porte sur un contrat pour l’acquisition de rames pour le Train à Grande Vitesse (TGV), dont 12 fermes et 6 en option.
Cette acquisition de rames s’inscrit dans le projet visant à étendre le TGV jusqu’à Marrakech, puis Agadir, en prévision de la Coupe du Monde 2030. Ces nouvelles rames viendront compléter les 12 rames Euroduplex du même constructeur français, en service depuis novembre 2018. Avec cet accord, les concurrents d’Alstom, comme le chinois CRRC, le sud-coréen Hyundai Rotem ou encore l’espagnol Talgo, sont définitivement écartés.
D’autres accords relatifs au secteur ferroviaire ont également été signés, notamment une déclaration d’intention relative à la coopération financière dans le secteur ferroviaire, un contrat d’assistance entre l’ONCF et la société SYSTRA/EGIS, ainsi qu’un contrat de fourniture d’appareils entre l’ONCF et la société VOSSLOH COGIFER, spécialisée dans les systèmes de fixation de rails, les traverses en béton, les systèmes d’aiguillages et autres services annexes.
En vertu de cet accord, le groupe français envisage de réaliser un projet d’investissement consistant en la construction et l’équipement d’un atelier de maintenance et de réparation (MRO) de moteurs d’avions LEAP, pour un montant d’investissement de près de 130 millions d’euros. Leader depuis 22 ans de l’industrie aéronautique au Maroc, Safran emploie près de 4100 personnes dans 8 entreprises ou coentreprises.
Le nouvel atelier de Safran s’étendra sur 25.000 m² et sera situé dans la zone aéroportuaire de Casablanca. Il s’accompagnera de la création d’environ 600 emplois directs à l’horizon 2030. Le moteur LEAP, de dernière génération et plus économe en carburant, équipe la majorité des avions monocouloirs de nouvelle génération, dont les familles Airbus A320neo, Boeing 737 MAX et COMAC C919, soit plus de 3500 avions en service dans le monde.
Le Maroc figure depuis quelques années sur la liste des pays susceptibles d’accueillir les projets du groupe français. Total Energies avait annoncé étudier la possibilité d’investir plus de 100 milliards de dirhams dans un mégaprojet de production d’hydrogène et d’ammoniac verts dans la région de Guelmim-Oued Noun.
Toujours dans le domaine énergétique, un accord supplémentaire vise le développement de la coopération et des échanges entre les deux parties dans le domaine de l’énergie, notamment la politique énergétique et la planification, la certification et la régulation, les énergies renouvelables, les systèmes électriques, y compris la production et les réseaux électriques, la production d’hydrogène bas carbone et le stockage de l’énergie, les métaux critiques et le transport de molécules.
Rabat et Paris ont signé une déclaration pour la formulation d’un nouveau programme d’appui à l’Agence Nationale des Ports (ANP), articulé autour de quatre axes principaux : la transition verte des ports, l’amélioration de la résilience face au changement climatique, l’économie bleue et l’innovation, couvrant l’ensemble du territoire national, y compris les provinces du Sud (Dakhla et Laâyoune). L’AFD s’engage à mobiliser un prêt de 100 millions d’euros pour ce programme.
L’autre axe majeur des accords franco-marocains est le développement d’un écosystème national de jeux vidéo. Pour cela, une déclaration d’intention relative au soutien et à la structuration de l’écosystème de l’industrie culturelle et créative du jeu vidéo a été signée. La déclaration vise à renforcer la coopération en mobilisant l’expertise française pour soutenir la structuration de l’écosystème jeu vidéo au Maroc et la mise en place d’une Cité du gaming à Rabat.
D’un montant de 350 millions d’euros, cet accord vise à soutenir la stratégie de décarbonation du Groupe OCP au Maroc, le développement des chaînes de valeur agricoles et alimentaires en Afrique via l’appui à la plateforme «Agrifinance» de l’OCP, l’intensification des partenariats entre entreprises françaises et le Groupe OCP, ainsi que la formation et la recherche dans le domaine de la sécurité alimentaire.
Un autre accord de développement commun entre l’OCP et la société ENGIE a été signé dans le cadre d’un partenariat dans le domaine de la transition énergétique.
Cet accord contribuera au renforcement de l’écosystème industriel local et à la création de nouvelles opportunités pour les entreprises et leurs partenaires nationaux et internationaux. Il couvre cinq projets concernant les activités de l’OCP : le «réseau de transmission électrique», l’»hydrogène vert», l’»électricité verte», le «dessalement à usage agricole» et la «recherche et innovation».
D’ailleurs, dans son discours devant les deux Chambres, Emmanuel Macron a salué les efforts du Royaume, qui se distingue par des initiatives audacieuses, des “autoroutes de l’eau” au dessalement urbain, pour répondre aux besoins d’une population croissante et garantir l’accès à l’eau potable et à une irrigation durable.
“Je crois que peu de pays ont relevé cette question avec autant d’ardeur et d’innovation. Nous sommes fiers d’être l’un de vos partenaires dans cette politique inédite, des autoroutes de l’eau aux politiques de dessalement de vos villes, pour faire face aux défis de l’agriculture et de villes de plus en plus grandes qui accueillent une jeunesse toujours plus nombreuse. L’accès à l’eau potable et à une irrigation durable est indispensable”, a-t-il déclaré.
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